comme la vague, la pression du nombre
les grandeurs, les ordres de grandeur
les nombres de la puissance
l’eau
impensable puissance
hiatus entre l’image de la vague
et la dévastation, in-nombrable
dizaines de milliers de cadavres
mais pas d’oiseaux a dit quelqu’un
dizaines de milliers de cadavres
d’hommes et d’animaux
cadavres d’hommes comme hier ceux
des moutons atteints de tremblante
jetés dans des fosses, corps perdus,
jamais reconnus, âmes errantes,
insupportables absences,
âmes noyées
gonflées comme des outres
condamnées à hanter
les mémoires et les cœurs
millions de milliards de débris, de bris, de fétus,
de bribes, de lambeaux, de morceaux,
briques, bois, tissus, papiers, cuirs
déchiquetés, imbibés, déchirés
milliards de tonnes de boue
milliards de milliards de gouttes d’eau
invincible armée de
gouttes d’eau
coagulées levées par l’appel impérieux
de la tectonique, le jeu titanesque des plaques
liées en un mur plus dur que le plus dur des bétons
déferlante d’acier sur les sables
ondes broyeuses de vie, d’amour, d’espoir
de simples gouttes d’eau
en une coalition de terreur
l’infime comme arme de la puissance déchaînée
demain les virus et les bactéries
nombres déraisonnables
que la conscience, la raison, le cœur même
ne peuvent appréhender
cent mille, deux cent mille morts peut-être
et les disparus
et cette cohorte de petits corps d’enfants
alignés comme sortis d’une poupée gigogne
le premier jour
mais pas d’oiseaux a dit quelqu’un
les nombres, les puissances, les hauteurs, les forces,
les étendues, les destructions, les compteurs qui tournent
comme des fous, qui s’emballent
ceux dont ne saura jamais plus rien
rayés de la carte, rayés de la plage, rayés de la vie
balayés un dimanche matin
comme fétus
où étaient les oiseaux
ont-ils emporté les âmes noyées
©florence trocmé
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