Je reconstitue le chemin qui m’a conduite vers elle. Après la publication d’un compte
rendu de lecture sur Gabrielle Althen, Pierre Kobel
m’écrit pour me parler d’elle et d’une jeune poète qu’elle a très bien
connue, Béatrice Douvre, morte en 1994
à 27 ans après une vie douloureuse (anorexie dès l’âge de 13 ans) en laissant
derrière elle près de trois cents poèmes de très haute qualité.
Extrait d’un article de Jean-Yves
Masson, dans un très beau dossier de la revue Linea que Gabrielle Althen
vient de m’envoyer :
« Au lieu de réfléchir
toujours à ce qu’est la poésie, on devrait peut-être se demander ce qu’est un
poète : poète, celui ou celle par qui, une fois au moins, est advenu quelque
chose d’inouï.
Etre poète : avoir été
cette conscience où, dans les mots, s’est jouée une aventure qui touche à
l’essence même du langage. La poésie est peut-être cela aussi : parler comme si
on était déjà mort, écrire dans une langue qu’un jour plus personne ne parlera
» (p. 6)
En fait, dans la foulée, j’ai fait la fiche de Béatrice
Douvre et je l’ai introduite dans l’anthologie de Poezibao. Je sens
d’ores et déjà dans les quelques textes lus, effleurés devrais-je dire plutôt, quelque chose de fulgurant parce que enté en même temps sur le néant et sur
l’absolu en une terrible tension. Ce qui me fait penser soudain que l’anorexie
est une quête de l’impossible, néant et absolu, vider le corps de sa substance,
de sa chair pour atteindre à un état surréel. Échapper à sa matérialité. Mais
il ne s’agit pas de réduire Béatrice Douvre à cette anorexie, même si je pense
qu’il doit y avoir un lien très étroit entre cette histoire-là de ce corps et
le corps de son écriture.
FT
A propos des pavés que vous avez photographiés : je trouve cette idée formidable. En France, on trouve sur les maisons des plaques de marbre pour signaler que tel poète, général ou artiste a habité dans la-dite maison, mais, à part l'extraordinaire Mur de la Shoah, on ne trouve plus trace des 70 000 juifs emmenés un matin par la police française vers leur destination "finale".
Merci de cette note.
HK
Rédigé par : Kaufman Henri | 09 octobre 2005 à 17h38