J’ai regardé l’arbre en fleurs.
J’ai regardé l’image de l’arbre en fleurs.
Je regarde, je sonde l’image de l’arbre en fleurs en moi.
L’arbre et ses fleurs. Cette exubérance contenue, cette forme folle, cette
expansion retenue, cette magnificence gratuite, que personne peut-être, hors
moi alors, n’a regardées, n’a captées.
Les branches de l’arbre ployant sous les fleurs par milliers sont venues
s’accoupler à mes branches intérieures, épousant mes réseaux internes, bronches
et veines, neurones et nerfs.
« L’éphémère est ce qui demeure dès lors que sa figure visible est sans cesse rééffacée » (programme de
la revue l’Éphémère) : dans l’image de l’arbre en fleurs, c’est la figure
même de l’éphémère qui est rencontrée. Mais au-delà c’est aussi la possible
identification à la figure, sous l’apparence de l’éphémère, qui vient s’allier
à la représentation intérieure et de l’arbre et des arbres en soi.
S’ajoute à cette arborescence complexe le fait que l’éphémère a été saisi,
arrêté artificiellement par la photo. Le rééffacement a été rendu – ne
serait-ce pas acte violent, violentant – plus difficile par une inscription,
une gravure sur un support (peu importe lequel sauf que ce n’est pas le support
récréant du dessin, mieux encore du poème mais un support enregistreur de
l’intégralité du donné de cet arbre à ce moment-là du déclenchement).
Déclenchement catastrophique peut-être alors qui suspend le cours normal des
choses, l’archéologise, en fait un vestige pompéien, pris dans la cendre de son
support.
Trajets de l’arbre en fleurs.