
Le feu, ce feu que j’ai vu, ce feu que j’ai scruté dans l’âtre, que j’ai photographié. Me reste hermétique, demeure mystère. Théâtre, théâtre d’ombres, scènes où se jouent dix drames, consumation, écroulement, incinération. La brûlure, le rougeoiement mais aussi la chaleur, la lumière, le rayonnement. L’attrait, et ce théâtre d’ombres si l’on entre dans ce feu. Par l’œil, entrer dans ce feu, se faire hôte du feu en tenue ignifugée, se percher sur la brindille transformée en cendres de bout de cigarette, grise, friable, pendue au-dessus du vide, prête à mourir, à s’éteindre, à se disloquer. Cette courbure d’une branche chauffée au rouge mais pas consumée, résistante du feu intérieur. Cette bouche creusée dans la bûche et qu'habite une lampée de feu encore, rougeoie, brûlot dans le noir. Feu inépuisable par le dire, les mots, feu en voie d’extinction, chaleur en déclin, cendres envahissantes, étouffantes. Le rayonnement quitte la lumière, se concentre en chaleur de moins en moins élevée. Tout s’éteint, mathématiquement programmé pour s’éteindre. Petites consumations marginales, craquements ultimes, le rouge en perdition, le gris, le noir, la cendre mangent la lumière, le feu. Tout s’éteint, mille feux du monde de jadis, tout s’éteint, s’affaiblit, se refroidit. Du feu à l’instant ne restent que cendres à présent.