Mordus d’ombre
et toi mordue d’ombre – tu parles au vide, projetée dans le noir du vide – le sombre, l’ombre même, mangée par le vide en avant de toi – sous chaque pas, pompe aspirante, silences et cris, tout appelle du fond des âges, tout se tait du fond des âges – muets ils s’enfoncent toujours plus avant, cohorte sans fin, les mangés d’ombre – du fond de l’horizon, cris, ils ne sont que cris silencieux, bouches ouvertes sur des ponts, à jamais, orbites exorbitées, noyés, déterrés, les en-allés – affleurent sous la ligne de flottaison du papier, aimantés par la pointe du crayon – ils montent, sans fin ils montent du fond, cendres, laves, pétrifiés, écorces, aubier – recherchent la lumière, la surface, l’air et l’air, la surface, la lumière sur eux pèsent de toutes leurs forces, presse immense à les renfoncer dans les tréfonds, appels fondus en un seul, clameur sourde, battement incessant, le cœur du monde, pulsation vers son avenir.