Isabelle Baladine Howald
Elle vient de publier dans le dernier numéro de la Revue de Belles Lettres un texte bouleversant et magnifique sur la mort de son frère Pascal. Elle a su trouver la voie pour dire quelque chose par l’écriture de ce drame, de ce qu’il provoque en elle et porter ainsi sa douleur vers l’universel, de telle sorte que ce texte peut parler à tous.
Insomnie
Très beau texte de Pierre Chappuis sur l’insomnie et l’écriture, dans ce même numéro de la RBL
« le besoin de poésie, diffus ou par moments précis, fixé sur un objet, sourd ou lancinant. Manque et désappointement, élans inaboutis, sol en vain piétiné jusqu’à n’être plus propre à rien. Un peu comme être pris dans les filets de l’insomnie. Qui en est victime, plus il se débat et plus il s’empêtre, plus il lutte et plus il éloigne de lui ce qu’il cherche à atteindre. Chassant, s’efforçant de chasser pensées, hantises graves ou superficielles, mesquines ou non, tant obsédantes qu’occasionnelles, qui occupent son esprit, il ne fait que les y ancrer. S’en croit-il débarrassé, le voici face à un écran opaque, totalement noir. Plus d’image, plus rien, mais pas moyen de se rendormir à moins de faire le vide, de ne rien vouloir, de ne rien chercher. Le pire : il a beau le savoir, malgré lui il peine, le malheureux, il peine à laisser s’installer en lui un état de non vigilance (néanmoins fait de vigilance), de non attente (et néanmoins d’attente) ; une attente en quelque sorte sans objet.
Poésie : peut-être alors, sans crier gare. »
(Pierre Chappuis, Revue de Belles Lettres, 2011/2, p. 47)
→ effet de portail dans ce texte, pilier gauche la poésie, pilier droit la poésie et entre les deux un développement sur l’insomnie, qui est à la fois un texte confondant de vérité sur l’insomnie et bien sûr une sorte de méditation plus ou moins larvée sur la difficulté à écrire.
Claude Dourguin
Toujours dans le même numéro, un autre texte très fort, sur l’appel d’une forêt de l’Est de la France, son caractère quasi mythologique, ses forces et son empreinte : « un envoûtement puissant, singulier gît encore dans les restes des vieilles forêts hercyniennes (49). Avec nombreuses et belles références à Gérard de Nerval : « encore une figure blonde qui pâlit, se détache et tombe glacée à l’horizon de ces bois baignés de vapeurs grises… » (5) Quel étrange écho avec Mont Ruflet, le feuilleton d’Ivar Ch’Vavar que je publie en ce moment dans Poezibao !
Antoine Emaz
« cette inversion, vieillir ». (Cuisine, p. 240)
→ le chemin à rebours ? Se déshabituer, se défaire, même, de ce qui a été petit à petit acquis pendant la croissance. L’agilité corporelle par exemple, ou celle de l’esprit. Accepter la limitation, renoncer au sentiment que le temps est ouvert, non compté, à disposition quasi infinie ?
Merveilleux bouquin que ce Cuisine, avec sa profondeur de vue et sa sincérité du vivre et de l’écrire. Aucune pose ici, mais la traduction vivante, passionnante, tellement humaine de cette quête du simple qui anime la poésie d’Antoine Emaz. Qui devient encore plus proche de ce qu’il veut bien nous introduire dans la cuisine… et dans tout le pénible et l’obstiné du vivre.
Véhicule prioritaire
staccato toujours du cœur, la pompe, la machine, fait le boulot, staccato et surtout ostinato et tête et cœur et corps là-dessus, en divergence, tempi différents, en phase ou désynchronisés, combinatoire dynamique ou désarticulation délétère – mais la persistance immuable (croit-on) du staccato interne, tire et propulse le temps coulant à travers soi – états, secondaires : le rythme, véhicule prioritaire.