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Rédigé par Florence Trocmé le 29 juin 2013 à 17h46 dans photomontages | Lien permanent
Lectures
récentes
Lus : Théodore Monod, pèlerin du désert ; Denise
Desautels, sans toi, je n'aurais pas regardé si haut ; éloge
de la truite de Denis Rigal. Déçue par le premier livre, un peu lénifiant,
même si le début évoquant le côté casanier de Monod et son attachement à son
petit coin de 5ème arrondissement est drôle et pour le moins
paradoxal quand on pense au grand « méhariste » qu’il fut… le reste
un peu bien-pensant. Beaucoup aimé le livre de Denise, sur le parc Lafontaine à
Montréal, sous forme d’une lettre à son fils. Ce parc dont elle m’a dit qu’il
faisait au fond fonction de maison d’enfance. Beaucoup aimé aussi le petit
livre de Denis Rigal sur la truite. J’ai souvent pensé à Bergounioux, qui
curieusement n’est pas cité….
En cours de lecture rêveuse enfin du livre de Marc Giraud, La nature en bord de chemin… il passe en revue un certain nombre de
petits milieux naturels, comme la haie, par exemple, avec de très belles photos
d’insectes, de plantes et conte des anecdotes intéressantes, un peu comme le
faisait Jean-Marie Pelt. Le livre peut aussi être une source d’inspiration pour
les photos.
Le trouble de pensée (Gisèle Berkman)
Gisèle Berkman ouvre son livre (La
Dépensée) par un chapitre sur un trouble
de pensée singulier puisque lié au Japon et à Fukushima. Devant certains
faits dit-elle, et bien sûr on pense aux situations traumatiques, « le
processus de pensée se désanime et se suspend » (19).
→ Avant d'en venir à ce qui provoque ce trouble de pensée, je relève trois mots
importants. La pensée est un processus,
animé et dynamique. Susceptible d'être soudain bloqué, arrêté, suspendu, voire
entravé. Ou pour le dire autrement, bien des bâtons peuvent être mis dans les
roues de cette affaire-là, penser, et merci à Gisèle Berkman de ces remarques
précises avec parfois, à juste dose, recours à des images : « il
neige sur l'écran intérieur et la limite idéelle entre intérieur et extérieur
commence à se dissoudre » (ce qui, soit dit en passant, fait partie
intégrante de certains troubles mentaux).
Une main écrit et pense pour l’autre
main (G. Berkman)
Et cette remarque sans doute essentielle pour le poète : « lorsque le
réel déborde notre capacité d'assimilation, il faut nous en remettre à
l'archivage, cette prothèse. Tout travail d'écriture et de pensée est sans
doute affaire de seconde main » (20) et en effet, « une main
écrit et pense pour l'autre main. Une main traduit l'autre, et il faut toujours
deux mains, une pour éprouver la chose jusqu'à la stupeur et au
dessaisissement, et une autre pour en acheminer le fantôme, en traduire la
vibration continuée. » (21)
→ Ici je pense à Hélène Cixous qui me semble mettre exemplairement ce processus
là en œuvre en jouant des deux mains !!!
Gisèle Berkman était au Japon en août 2012 dans la région dévastée du Tôhoku et
elle y a éprouvé cela, qui semble être le germe de son livre : « la
pensée se trouve face à un bloc intraitable » (22)
Elle précise : « la puissance imageante du rapprochement semblait être
devenue un recours pour de déprendre de l'impensable » :
→ que c'est juste! L'ai éprouvé tout récemment devant les images de ces
torrents fous dévalant dans les maisons lors des récentes crues des Pyrénées. C’est
tellement inimaginable que la machine à fabriquer du « comme » tente
de démarrer comme le fait le groupe électrogène lors de la coupure
d'électricité, pour tenter de planter des petits fanions de balisage sur cette masse
impensable, ce bloc intraitable. On
tente de l'approcher par des analogies. Car il faut du sens : « et
très vite le sens fit retour, invoqué comme remède, comme salut, comme
cautère applique sur l'impensable. » (27)
Le processus de pensée se nourrit
constamment (G. Berkman)
→ Je note que dans sa réflexion à partir de la catastrophe de Fukushima à
propos de laquelle elle est censée faire une conférence, Gisèle Berkman montre comme se fait le travail
de pensée et surtout comme il s'appuie sur toutes sortes de sources, certaines
utilisées comme repoussoir (JP Dupuy et sa petite métaphysique des tsunamis,
d'autres présentées pour poser une hypothèse (le désastre selon Blanchot). Le
processus de pensée se nourrit continûment. Un minimum de connaissance est
indispensable au travail de pensée et l'on comprend de mieux en mieux pourquoi
Rimbaud disait qu'il « réclamait de larges tranches de temps » ! Je
note que G.Berkman se sert aussi de toutes sortes de sources, comme
mails, journaux. Ce qui renvoie à la question du devoir d'information.
De la bêtise (Gisèle Berkman)
Après avoir littéralement parcouru le désastre ou la catastrophe de
Fukushima et donc procédé à une première analyse d’un trouble de pensée, à savoir ce qui la sidère, la bloque, Gisèle Berkman
passe à la question de la bêtise et du décervelage concerté mis en œuvre
aujourd'hui. Elle parle en premier lieu de « toutes les puissances qui
démantibulent le sujet, en dispersent aux quatre vents la fragile souveraineté. »
La bêtise, ce serait cette « puissance d'informe qui souffle sur le Sujet,
ce serait le fond médusant et stupéfiant la forme, la détermination a
l'arrêt et captée par l'indéterminé. » (49)
Mais, dit-elle, cette frappante et très parlante description concerne en fait surtout
la bêtise telle qu’elle s’exprimait au XIXème siècle. Rien à voir avec « la
fabrique du temps de cerveau disponible » :
on est aujourd'hui passé à la connerie,
ajoute-t-elle : « la bêtise, toujours prise en tenaille entre
animalité et folie, pouvait être définie comme l’impropre propre de l’homme. Avec la connerie – prise à la lettre, dans sa teneur idiomatique,
proprement intraduisible –, le mot fait la chose et la défait selon son
essence, qui est de faire trou. » (51)
Et de citer les empêchements à penser « dont nul ne saurait se dire exempt :
stupeur soudaine, difficulté à “trouver des idées” ou à s’orienter dans leur
labyrinthe, mais aussi reproduction des formes apprises, incapacité à s’autoriser,
à formuler pour soi-même ce Sapere aude !
(Ose savoir !) dont Kant avait
donné la formule fondatrice ». Or pour Kant « penser consiste à inventer son propre mouvement, c'est la
marche libre d'un sujet qui ose se délier de sa roulette d'enfant. » (51)
→ à ce stade, j’ajouterai comme empêchement à penser, souvent et pour beaucoup,
la question des mots, de la formulation, du vocabulaire. Je pense que Gisèle
Berkman l’abordera dans la suite de son livre. Mots pour le dire, mais aussi
mots dans les textes, notamment philosophiques, les « grands mots »
qui font peur, ou les catégories très générales, type le Beau, le Vrai qui
disent si peu qu’ils finissent par voiler complètement le raisonnement pour le
lecteur peu averti.
Philippe Jaccottet
Relevé hier ces deux formules
importantes dans la belle note
qu’Antoine Emaz vient de consacrer à Taches
de soleil, ou d’ombre, de Philippe Jaccottet.
« La littérature devrait sauver l’essentiel, mais sans y penser ou surtout
s’en targuer. » (p.166)
Et cela aussi qui pourrait être une devise :
« Rendons compte de ce qui reste d’exaltant dans la vie la plus
simple. » (p.58)
Schubert, Voyage d’hiver, 5, « le tilleul »
Le voyageur s’éloigne du lieu du bonheur et de la déception, mais que de
choses encore l’attachent à cet endroit ! Le tilleul par exemple, dont il
évoque le bruissement, ainsi que les moments heureux qu’il a vécus dans son
ombre ou encore son rôle de confident… : « in Freud und Leide, Dans la joie et la peine », il y revenait.
Il est passé au pied de l’arbre, il y a peu, dans la nuit noire, au seuil de
son voyage d’hiver et il est pris dans un sentiment presque hallucinatoire,
comme si le tilleul encore lui parlait, alors même qu’il s’est éloigné de cet endroit, enfernt von jenem Ort ; Ort, endroit qui rime avec dort, là-bas, toute la puissance de ce
qui le retient encore, alors qu’en fait le vacarme d’un vent glacé a depuis
longtemps remplacé le doux bruissement de l’arbre. Ort et dort marqués par
un petit motif croche pointée deux triples qui sonne comme une interrogation
douloureuse (plus ou moins selon les pianistes !)…
C’est un des lieder les plus connus du cycle et en un peu moins de cinq
minutes, par le jeu des modulations, il parvient à épouser toutes les
fluctuations du sentiment du voyageur, déchiré entre une immense nostalgie et
l’effroi devant ce qui l’attend. Le lied commence dans un climat de sérénité,
en mi majeur. De nouveau, comme dans le lied précédent, un motif en triolet, de
doubles croches ici, pour évoquer le bruissement de l’arbre. Six strophes qui
construisent en pas à pas le drame, depuis le tableau apparemment idyllique du
début, la fontaine, le tilleul… jusqu’à l’éloignement final et le conditionnel
passé du dernier vers, « là-bas, tu
aurais trouvé le repos, Du fändest Ruhe dort ! » À la fin de la
quatrième strophe, le climat se tend et on arrive sur un effet de surprise, un sforzando au début de la cinquième
strophe sur les mots « Die kalten
Winde bliesen /mir grad ins Angesicht », que F. Wandelère traduit par
« la bise glacée me soufflait / En
plein visage. » Et ce qui est remarquable c’est que Schubert ne change
pas la texture de la musique, simplement il distribue les accents et le
crescendo et ajoute de nombreux chromatismes dans l’accompagnement en doubles
croches du piano avec un effet de pédale sur un dos bécarre, suscitant la peur.
(Fischer Dieskau avec Gérald Moore ou bien
une version, hélas non identifiée, avec la
partition annotée pour les jeunes lycéens préparant le bac 2013. Un petit
conseil : ne pas hésiter à visionner cette seconde version, même si on ne
sait pas lire la musique, il y a un curseur qui suit la musique et cela peut
permettre sans doute de comprendre certains des commentaires )
Et comme je le fais toujours, mais a
posteriori, vérification dans le Franz
Schubert de Brigitte Massin, notamment sur la question des tonalités. Elle
rappelle que de tous les lieder du cycle, c’est le seul « qui ait
immédiatement reçu l’approbation des contemporains » et écrit qu’après « L’Engourdissement »,
« Le Tilleul » apparait comme un « sursaut vital » et
petite fierté pour moi, elle parle aussi du caractère hypnotique du motif de
triolet dans les deux lieder. En revanche, elle montre, ce que je n’avais pas
vu, que Schubert distribue en quatre strophes les six strophes du texte de Müller.
Rédigé par Florence Trocmé le 29 juin 2013 à 17h41 dans Bribes de Flotoir | Lien permanent
Rédigé par Florence Trocmé le 28 juin 2013 à 19h51 dans photomontages | Lien permanent
La dépensée, Gisèle Berkman
Gisèle Berkman a eu la gentillesse de m’envoyer son nouveau livre, La Dépensée (Fayard) et j’en entreprends
la lecture.
Très vite, dans son introduction, elle cite Rimbaud et sa remarque magnifique: « la
pensée réclame de larges tranches de temps » (8)
Aujourd'hui dit-elle dans ces pages d’ouverture, l'activité de pensée
s'amenuise. C'est une activité désinvestie, un « inutile supplément d'âme »
→ il se trouve que j’ai aujourd'hui même entendu dire dans l’émission du Grain
à moudre de France Culture que « les médias n'aiment pas la
pensée. ». Sans doute parce que qui veut dominer, d’une manière ou d’une
autre, redoute la pensée qui forge la critique et peut armer la contestation.
Gisèle Berkman s’explique sur ce beau titre, un peu étrange : « j'ai
choisi d'appeler dépensée ce mélange singulier de discrédit, de peur,
d'inappétence, d'inhibition aussi qui grève aujourd'hui l'activité de penser »
(9). Car il semble bien y avoir de nos jours une antinomie profonde entre
pensée et productivité ; alors que dans le domaine de la pensée la « productivité
se joue au risque de son improductivité » et que « l'invention, la
trouvaille sont au prix d'une négativité assumée » (10).
Et au passage, l’auteur égratigne ce qu’elle appelle une « Apologie sans
nuance du “tout neurobio” » !!!!
Bref, il y a selon Gisèle Berkman qui l'a constaté notamment dans des classes
en banlieue un « trouble de pensée » mais aussi ce fait que la dépensée
c'est aussi l'épreuve sidérante d'un réel
en pleine mutation. (11), ce qui me renvoie à ma toute récente discussion
avec Jean-Louis Giovannoni.
Elle termine cette brève introduction en expliquant que la dépensée est un « très singulier avatar contemporain de notre
inactuelle pulsion de mort » (16).
Du vert
via Christine Jeanney et sa traduction en cours
des Vagues de Virginia Woolf. Dire
ici l’admiration pour ce travail, work in
progress, avec une double caractéristique, tenir en même temps le journal
de cette traduction, où exprimer remarques et doutes et donner, courageusement,
la version originale en regard de la tentative de traduction. Merveilleuse
manière d’associer le lecteur à sa progression dans cette œuvre dont on
redécouvre la richesse inouïe.
« La lumière atteignit quelque chose de vert à l'angle de la fenêtre et
en fit un morceau d'émeraude, une grotte de vert pur, pareille à un fruit sans
noyau. »
→ il se trouve que par un hasard
surprenant j’ai photographié tout récemment un intense reflet vert à l’angle
d’un vasistas !
Autour de la dématérialisation
Jean Le Boël, dans un mail du 26 juin, donne quelques échos au dialogue
instauré avec Jean-Louis Giovannoni autour de la question de la
dématérialisation et du livre électronique.
Extraits de la lettre lettre de Jean Le Boël du 22 juin 2013
« en tant qu'éditeur, j'ai
participé, il y a quelques semaines, à une journée professionnelle consacrée à
l'édition numérique. [...] L'avenir du numérique n'est pas dans la reproduction
de la forme de la page. La technique permet de créer un objet tout à fait
différent avec des liens vers d'autres textes, des images, des enregistrements,
des animations, des vibrations peut-être... une espèce d'opéra numérique, en
somme. Cela conviendra pour tout ce qui est documentaire et à l'immense
majorité qui accepte qu'on lui fabrique ses images. On trouvera toujours quelques-uns
qui préfèrent les concevoir eux-mêmes. [...] De plus, on possède durablement le
livre papier : on peut donc le passer, l'échanger, sans que cet itinéraire soit
fiché à la différence de ses ersatz électroniques. »
et ma réponse :
→ La traçabilité de la lecture : une
horreur (sauf, celle secrète, et que l'on tentera d'appeler d'un autre nom, que
je tente parfois de découvrir, via le flotoir...
la trace du livre chez le lecteur.... etc.)
L'anonymat du lire, essentiel et menacé, vous me le faites remarquer.
Et toujours cet effroi, repensant aux méthodes de la Stasi (notamment) : quels
outils nous forgeons pour notre propre persécution !
→ j’ai eu vent d’une nouvelle proposition de Google, un outil permettant à
chacun de faire le catalogue de sa bibliothèque ou de sa discothèque… mais avec
comme toujours chez Google, une sorte de mainmise occulte sur le fichier et une
mise à disposition de celui-ci sur diverses plateformes. Quelle mine, là encore,
sur les goûts et les habitudes de chacun, quel levier pour le manipuler ou lui
envoyer de la publicité ciblée, quel outil formidable pour traquer et ficher sa
pensée !
Guillevic
dans « l’anthologie permanente » de Poezibao, aujourd’hui, avec ces
deux extraits qui me frappent particulièrement :
Pourquoi
Ne se dire à soi-même
Que les mots
Venus des autres ?
et
Les mots
Sont d’autant plus eux-mêmes
Qu’ils affrontent.
→ ce qui me fait particulièrement penser au travail de Mathieu Brosseau.
De l’écoute (Claudio Abbado)
Claudio Abbado vient d’avoir 80 ans ; trois extraits d’une interview
paru dans Die Zeit :
« La magie d’un instant musical vivant se laisse-t-elle contraindre par les
commandements d’un chef ? Elle arrive, ou justement, elle n’arrive pas.
C’est quelque chose de très tendre, de très fragile. Pour cela le chef doit
créer avec l’orchestre une atmosphère de franchise, de confiance mutuelle.
C’est là son travail essentiel. Et on doit apprendre à s’écouter l’un l’autre.
Écouter est si important. Dans la vie comme en musique. Et c’est une capacité
qui disparaît de plus en plus. »
Ou bien encore : « La musique nous apprend qu’entendre est fondamentalement
plus important que dire. Cela vaut aussi bien pour le public que pour les
exécutants. On doit très précisément écouter la musique pour comprendre comment
on doit la jouer. »
« C’est vrai que dans les répétitions j’ai la parole rare. Bien sûr,
j’essaie de mettre en place séparément les passages tels que je les ai appris
dans la partition, je laisse aussi souvent les groupes jouer séparément, non
pas parce qu’ils ont besoin d’une correction mais pour les autres, afin qu’ils
entendent par exemple ce que les bois jouent à ce moment. Ensuite vient la
grande arche, le flot du Tout, et c’est le plus important.
source de la traduction et article original en allemand
→ quant à ces expressions de grande arche
et de flot du tout, elles me renvoient
aux propos de cet autre immense chef, Celibidache, disant que toute l’œuvre doit être appréhendée comme présente dans la première note… et que c’est ce processus là
de la création qu’il faudrait idéalement revivre en jouant l’œuvre.
Rédigé par Florence Trocmé le 28 juin 2013 à 19h48 dans Bribes de Flotoir | Lien permanent
Lecture de Mathieu
Brosseau
Belle lecture hier soir du livre de Mathieu Brosseau, Ici dans ça, à la médiathèque Marguerite Duras, dans le XXème arrondissement de Paris.
Lecture très préparée, très professionnelle, ce qui n’est pas si fréquent. Un bon
rapport entre le piano, excellent et le texte. Le pianiste (Denis Chouillet)
avait sur le pupitre le texte annoté ainsi que ses partitions, dont beaucoup de
sa main et on sentait que les inserts musicaux étaient au millimètre près.
Quand on voit le côté foutraque de certaines « impro » et
« performance », on ne peut qu’être admiratif.
Pour ma part, une réticence sur de trop nombreux passages quasi hurlés par le
comédien (Nâzim Boudjenah, pensionnaire de la Comédie-Française) et aussi sur
un court passage par lui chanté, pas très convaincant. Autant j’aime les forte
en musique, autant je les redoute dans la parole théâtrale ou même dans le
chant lyrique… dès que j’ai le sentiment que « ça crie », je me
bouche les oreilles… et ne peux m’empêcher d’y voir un aveu d’impuissance,
celui de faire passer autrement la force d'une oeuvre. La
nuance à l'intérieur du forte, que ce soit au théâtre ou en musique, est presqu'impossible et le forte a tendance à écraser le texte. Mais aussi, nombre de très beaux moments, mezzo
voce, et une diction vraiment remarquable du comédien qui donnait le sentiment de s'être coulé à l'intérieur du texte. Étant très près, au
premier rang, j’ai pu observer le jeu de ses lèvres, notamment quand il disait les
nombreux passages denses et difficiles du livre, sur un tempo très
rapide : remarquable !
Et on sentait, presque tangiblement, la force du livre de Mathieu Brosseau, car
une telle présentation et une telle durée, plus d’une heure et quart d’un seul
tenant, auraient immédiatement démoli un texte faible ou fabriqué. J'ai d'autant plus apprécié que j'ai beaucoup lu et relu Ici dans ça ces dernières semaines. Il y avait beaucoup de monde, un public entre 70 et 100 personnes à mon avis,
ce qui est remarquable pour une lecture de poésie. Après la note de lecture du livre, je pense donner
dans quelques temps un entretien avec Mathieu sur Ici dans ça et j’ai prévu de relire les critiques des ouvrages
précédents signées Sébastien Ecorce publiées par libr-critique (ici et ici)
De la dématérialisation (avec Jean-Louis
Giovannoni)
Jean-Louis Giovannoni m’envoie un lien vers une amusante vidéo
à propos du livre électronique) et cela nous amène à un petit dialogue que je
reconstitue ici
Je réagis en effet à cet envoi et lui écris :
« je me souviens lors de l’apparition des tout premiers livres
électroniques, cette première génération qui a avorté, il doit y avoir près de
15 ans maintenant, le créateur du magnifique département jeunesse de Gallimard,
Pierre Marchand disait exactement la même chose… il avait alors fait le tour du
Salon du livre, passé un moment sur le stand très visité où l’on présentait les
toutes premières liseuses ; il avait alors annoncé qu’il avait trouvé
quelque chose de révolutionnaire (qu’il cachait derrière son dos) ; il a tenu
alors quasiment le discours que l’on entend dans la vidéo… avant de dévoiler ce
qu’il cachait : un de nos bons vieux et si chers bouquins !
Pour ma part, j’en viens de plus en plus à leur donner raison. Un livre
exigeant comme Ici dans çà de Mathieu
Brosseau, j’ai dû le lire et le travailler sous forme de PDF puis sur mon iPad,
et j’ai eu des difficultés à le faire ; tous mes repères se perdent, je ne peux pas
circuler dans le livre… Je suis sans doute trop imprégnée de la culture du
livre pour faire un usage autre que strictement utilitaire du livre
électronique…
Lettre de Jean-Louis Giovannoni, du 20 juin 2013, que je reproduis ici avec son
accord car elle a l’immense intérêt d’élargir considérablement le champ de la réflexion
et d’une manière qui me semble cruciale.
« Certes nous appartenons tous deux à la génération "bouquin",
mais ce qui me semble au centre de ces inventions actuelles (assez étonnantes,
il faut le dire), c'est la dématérialisation. Peu importe les arguments
utilisés par les tenants de ces nouvelles technologies (elles ont leur utilité
sans aucun doute), il est à constater que nous sommes en train de nous séparer
de plus en plus de ce que l'on pourrait nommer : "la réalité
tangible", des objets et choses auxquels se confronte notre rencontre avec
eux. Il y a un écran supplémentaire entre nous et cette réalité. Déjà notre
regard, la langue servent de semelle d'interposition entre nous et ce que nous
allons appeler le "réel". Lacan disait du "réel" c'est
l'impossible. Au sens où il ne peut en aucun cas être importé tel quel en nous.
Il est médiatisé en permanence. Mais dans ce travail de traduction sa fonction
de réel existe toujours. Le réel c'est ce qui vient dire l'impossible, les
limites, les bornes dont il faut tenir compte pour continuer à vivre. L'écran
des nouvelles technologies vient nous dire : "qu’à cela ne tienne, nous
allons supprimer la trop grande prégnance du réel en donnant l’illusion de
sa dématérialisation."
Un simple mouvement de doigt et l'on pourra glisser sans encombre sur ce réel
dénié sans que plus rien, en lui, ne nous arrête. Le réel devenant alors un
fond de paysage, un décor.
C'est aussi la notion de "sans limite" qui est tout de suite associée
à ces nouvelles inventions. "Dématérialisation" et "sans
limite", enfin la pesanteur n'est plus un problème; enfin le corps, la
corporéisation n’a plus lieu directement mais par l’entremise de cet écran qui
éloigne, tient illusoirement ailleurs ce qui devrait être là. Un être-là
différé.
En parlant avec Gisèle Berkman [qui vient de publier La dépensée, chez Fayard] de ces inventions récentes et du fait que je
parlais de dématérialisation, elle me faisait remarquer, à juste titre, que ces
tablettes étaient toujours un support matériel, et que d'une certaine façon
toute activité de l'homme suppose un support, un lieu où elle surgit, se tient.
Et même si ces tablettes sont très fines et pèsent peu, elles sont entre nos
mains. Elle ajoutait cette autre remarque intéressante, que l’on était agi d’une
certaine façon par la programmation de ces engins.
Mais revenons à la dématérialisation à laquelle on assiste actuellement
dans beaucoup de domaines. Il est évident que c’est une autre façon d'être, de
se situer dans l'espace et par rapport au réel. Une autre façon d'entretenir un
rapport avec le réel, en lui superposant une réalité qui ne toucherait pas trop
directement ce dernier. Un réel de loin, filtré qui irait là où on a décidé de
le mettre. Un réel de mémoire en somme stocké sur un disque dur (que l’on ne
voit jamais car bien caché au fond de l’engin.
Ce qui est perdu, dans cette affaire, c'est peut-être un rapport à l'épaisseur
de l'espace, à la nécessité du parcours, pour le remplacer par le raccourci des
gestes et une compression du temps et de tout ce qui limite. On n’est plus en
l'espace, comme tout corps est plongé dans l'espace, on n'est plus compris
en l'espace mais posé devant un écran extra-plat que l'on commande d'un seul
doigt ; le doigt léger de la maîtrise technologique semblable à celui de Dieu
peint sur la plafond de Chapelle Sixtine. C'est une façon de nous faire croire
que tout peut nous obéir au doigt et à l’œil. La maîtrise par excellence.
Et voici ma réponse :
« Je suis d’accord avec ton analyse et comme j’aime le faire, j’ai essayé
de la rapporter concrètement à ce que je vis, et singulièrement ce que je peux
vivre en ce moment dans mes relations avec nombre de mes interlocuteurs, du monde
de la poésie… peut-être que cette dématérialisation dont tu parles avec grande
justesse joue aussi dans les relations interindividuelles, peut-être qu’elle
efface le rugueux de la vraie relation, avec une personne en chair et en os,
qu’elle « débranche » toute l’interaction entre deux personnes qui se
voient, voire même qui s’entendent au téléphone et que cela finit par induire
une forme d’idéalisation de l’autre qui risque d’aboutir ensuite à une
désillusion, car l’image que l’on a ne s’est que trop peu enrichie, nuancée,
voire corrigée de tout ce que la relation personnelle, concrète induit ?
Le mail est une forme d’écran, une mise à distance au fond de la réalité
concrète de l’autre (à commencer par sa disponibilité, dont nous faisons un peu
fi, au prétexte que le mail ne dérange pas, comme le fait un appel
téléphonique). Donc j’ajoute un peu à ta réflexion, en envisageant l’aspect des
relations interpersonnelles, pan considérable de ce réel si problématique.
Se peut-il aussi que dans tout cela il y ait une dimension de fuite ? On
dit bien « fuir la réalité »…. ?
Schubert 4, Estarrung, Engourdissement
Il y a ici dans ce 4ème Lied du Voyage d’Hiver de Schubert quelque chose de constamment agité, un
peu en contradiction avec le titre qui évoque un engourdissement. On a le
sentiment tout au long de la pièce que le sentiment amoureux n’est pas mort !
Schubert précise d'ailleurs ziemlich schnell, plutôt rapide. La pièce est en do mineur
mais module beaucoup. Le piano du début à la fin joue un motif en triolet
(trois croches par temps au lieu de deux – voir la partition défilante dans la
vidéo Youtube donnée en référence), motif agité, frémissant qui passe de la main gauche à la main droite et est même joué un moment donné par les deux mains ensemble. L’engourdissement
de la douleur, c’est peut-être ce à quoi tend celui qui chante, mais il n’en
est pas encore question semble dire la musique. Il y a ici encore beaucoup de
sentiments à vif et brûlants et l’on retrouve d’ailleurs l’opposition heiß et Eis notée dans le lied précédent. Il y a comme un désir d’étreinte,
dans la recherche de la trace (Spur).
Le poème est composé de 5 strophes, disposées en 2/1/2, avec en position
centrale, soulignée par la musique qui module en la bémol majeur, une ouverture
avec le thème des fleurs et de la verdure, floraison (Blüte) de courte durée puisqu’en fait, les fleurs (Blumen) sont mortes (erstorben) et l’herbe n’est plus verte (grün) mais si pâle (blass). Et malgré tous ces mouvements opposés incarnés par la
mélodie du chanteur, il y a une grande
unité de la pièce qui coule d’un seul trait et cela est dû sans doute au
continu du motif en triolet.
Comme dans les précédents lieder, quelle adéquation entre les variations de la musique
et les nuances les plus fines du texte !
(On peut Écouter « Erstarrung » ici
par Fischer Dieskau et Jörg Demus, avec partition défilante, beau commentaire
(en anglais) de Fischer Dieskau sur l’ensemble du cycle, texte allemand et
traduction en anglais.
Une bonne page ici, sur le Voyage d’Hiver sur le site de France Musique.
Et une version
française des textes par Gil Pressnitzer
Rédigé par Florence Trocmé le 21 juin 2013 à 21h14 dans Bribes de Flotoir | Lien permanent
Rédigé par Florence Trocmé le 19 juin 2013 à 18h05 dans photomontages | Lien permanent
Ciel (du déferlement)
Orage ce matin vers sept heures, le ciel était tout jaune, l’orage semblant
assez haut dans le ciel. Léger rafraîchissement de l’atmosphère. Mais ailleurs,
dans les Pyrénées, gravissimes inondations en raison de la conjugaison d’une
fonte des neiges rapide et abondante et de pluies diluviennes. Garonne et Adour
transformées en torrents de boue furieux, dévastations multiples. Étonnante analogie
intérieure avec images de foules déferlantes au Brésil ou en Turquie. Le déferlement
comme caractéristique du XXIème siècle ?
Yeux éblouis (De la photo)
« Cent fois nous avons ouvert des yeux éblouis »….
→ La photo pour moi est un accès privilégié à l’émerveillement.
« un pas de côté, la beauté flambe »
→ Photographier permet ce pas de côté,
car « l’habitude offusque ces éclats », nous les oublions, ne savons
plus les voir, obsédés par nos minuscules et vains ressassements, noyés par la
violence du monde, le déferlement ininterrompu de ce qui nous atteint et dont nous ne
pouvons plus rien retenir. Sauf peut-être par le si bien nommé instantané ?
« miroir à l’infini /de l’infini des lumières & /des ombres » (source)
→ Montage de fragments relevés en
préparant « l’anthologie permanente » de Poezibao. Le texte de
Jean-Paul Michel a soudain coagulé avec quelques réflexions en cours sur la
photographie, induites par l’achat d’un nouvel appareil hier ! Et
travaillant sur mes sites de veille, je découvre cet article et ces mots du
photographe Mark Power (source)
« that's one of the things I love about photography - it never tells us
everything.”
que je traduis par « c’est une des choses que j’adore avec la photo,
elle ne nous dit jamais tout » (en espérant ne pas faire un contre-sens !)
Météo marine
“Intangible and
mysterious, familiar yet obscure, the shipping forecast is broadcast four times
daily on BBC Radio 4. For those at, or about to put to sea, the forecast may
mean the difference between life and death.
But for millions of landlubbing radio listeners it is more than this; the
enigmatic language of the forecast has entered the public consciousness,
creating a landscape of the imagination and confirming romantic notions of
Britain's island status.”
→ Nous les avons tous
entendus, ces bulletins de météo marine et nous sommes sans doute nombreux à
avoir ressenti ce que le photographe Mark Power évoque ici : intangible et
mystérieuse, familière mais pourtant obscure, la météo marine est diffusé
quatre fois par jour à BBC Radio 4. Pour ceux qui sont en mer ou sur le point
de prendre la mer, ce bulletin peut faire la différence entre la vie et la
mort. Mais pour les millions de terriens qui écoutent la radio, c’est autre
chose : cet énigmatique langage de la météo marine a pénétré les
consciences, modelant les paysages de l’imagination et façonnant les idées
romantiques autour du statut des iles de Grande Bretagne. (traduction
approximative et à la volée !)
→ je pense à Henri Droguet, quand peut-être il lira ces mots…. Henri Droguet
présent dans le dernier numéro de la revue Décharge avec ses « bousillants
dévorateurs bouillons de la mer ». « Cap à nulle / part au blanc rien
/ cap au ni vu / Ni connu noir » : météo marine ? (Décharge,
n° 158, p. 36)
→ chemins d’une rêverie matinale, en bonne compagnie (très importante la
compagnie, pour la rêverie).
Larmes gelées (Schubert,
Wintereise)
Avec le troisième lied du Voyage d’hiver, "Larmes gelées", la transition est en route, le voyageur quitte l’univers de l’amour
espéré, de la maison cossue pour la route de nuit… et les larmes, qui le
surprennent, semblent geler sur ses joues. « Ob es mir denn entgangen /Dass
ich geweinet hab ? mot à mot « pourrait-il être arrivé à moi d’avoir
pleuré », plus élégamment traduit par F. Wandelère, « Se
pourrait-il donc que j’ai pleuré ? »
On est ici en fa mineur. Et le piano démarre sur une série d’accords piqués
dans le pianissimo, deux noires, une blanche, et même s’il faut se garder de
tout figuralisme (j’y reviendrai sans doute mais ce début de travail sur le
cycle du Voyage d’hiver met un peu en cause pour moi l’idée de l’inexpressif
musical), on imagine les gouttes gelées. Puis sur l’évocation des larmes, la
voix descend très bas, tout en chromatismes. Mais Müller et Schubert, lequel
précise nicht zu langsam, pas trop lent, créent un contraste presqu’oxymorique
autour de ces larmes, gelées sur les joues, mais brûlantes dans le cœur, avec
un jeu sur la rime heiß (brûlant)
et Eis, glace et dans la musique une opposition entre le pianissimo et
le piano des deux premières strophes et les sforzandi (accents brefs) de
la dernière strophe. Avec une grande amplitude vocale dans la mélodie d’un ré
jusqu’au sol de l’octave supérieure.
Et je découvre que six des lieder du cycle sont inscrits au programme du bac L enseignement
de spécialité musique. [Partition
Schubert et ici, le lied par Dietrich Fischer Dieskau et
Murray Perahia (son médiocre malheureusement), par Hermann Prey (pianiste
non précisé) ou Hans Hotter (avec Gerald
Moore) et enfin une version plus récente, de Werner
Güra et Christoph Berner (avec le texte allemand)]
Rédigé par Florence Trocmé le 19 juin 2013 à 17h15 dans Bribes de Flotoir | Lien permanent
Rédigé par Florence Trocmé le 18 juin 2013 à 18h09 dans photomontages | Lien permanent
Voyage
d’hiver, Die Wetterfahne, La Girouette
[Suite d’une traversée, lied
à lied, du Voyage d’hiver de
Schubert, deuxième étape du voyage)
Plus court, le deuxième lied est en la mineur. Plutôt rapide et unruhig, inquiet, agité, demande
Schubert et en effet, qu’il est agité entre des sentiments opposés, le chanteur !
la girouette (Wetterfahne), il
comprend qu’il aurait dû la remarquer plutôt, car elle symbolise son échec et
le choix qu’a fait la jeune fille aimée d’un plus riche prétendant (comme le
laissait supposer l’allusion à la mère et au mariage dans le premier lied du
cycle !). Le thème du vent débute par un arpège et mêle les croches et les
double-croches tandis que la mélodie, elle, s’ouvre par un assez grand
intervalle, une sixte mineure, de mi à do, mais ce qui me frappe surtout c’est
l’alliance du subjonctif dans le texte (en français un conditionnel) et en
regard d’un traitement quasi hoquetant de la mélodie Er hätte es eher bemerken sollen, j’aurais dû remarquer plus tôt (la traduction de Frédéric Wandelère
remplace le il par le je, me semble-t-il et je trouve cela un
peu dommage, car c’est atténuer l’effet du tournoiement qui semble s’emparer du
narrateur. Il aurait dû voir la girouette et comprendre que cette maison ne
pouvait abriter une femme fidèle ! Le lied se termine par une sorte de cri
de dérision et de rage avec une montée
toute en doubles croches au piano, sur le mot reiche (riche) leur fille est
une riche fiancée, Irh Kind ist eine reiche Braut. Le chanteur sur Rei… est monté sur un mi aigu puis
descend au sol dièse inférieur (note sensible) sur le che, encore une sixte mineure descendante. Et le piano termine dans
une sorte de petit thème bouillonnant dans le grave. Que de choses dites en un
peu plus d’une minute ! (écouter ce
lied par Hans Hotter avec Gérald Moore au piano ; le texte allemand
est donné sur cette page youtube)
« poème dénoué flottant » (Liliane Giraudon)
Repris Madame Himself depuis le
début…. C’est un livre complexe et il n’était pas superflu de relire
l’avant-propos de Liliane Giraudon, après avoir lu tout le livre. Il procède
par éclats, que l’on peut classer tour à tour aphorismes, versets, sentences,
croquis, notations rapides, bribes de dialogue, fragments de récits. Un régime
de phrases, oui, parfois énigmatiques comme un oracle, parfois lourdes de tout
un arrière-plan d’angoisse… et peut-être toutes en fin de compte
interrogatives, même quand elles n’ont pas cette forme sur le plan
grammatical : « les mots joints ne sont pas obligatoirement adjacents »,
dit-elle (37), sans doute en va-t-il de même des phrases ici, on se demande
alors si plusieurs histoires et thèmes ne courent pas ensemble sur les pages,
se rejoignant, s’écartant, un peu comme, en musique, les éléments d’une fugue à
plusieurs voix…. C’est une mise en pièce des évidences un peu trop évidentes,
une contestation de la foi que nous avons dans les mots censés traduire quelque
chose du réel et de plus, de la même façon pour tous. Or, « les
substantifs sont des noms propres. / Ce sont tous des accessoires./
Regardez-les ils bougent. » (79). Tout bouge, rien n’est fixe, l’écriture
court après cette mobilité, tente d’en saisir quelque chose sans figer… : « espèce
de poème dénoué flottant ».
Rédigé par Florence Trocmé le 18 juin 2013 à 18h06 dans Bribes de Flotoir | Lien permanent