Il y a toujours quelqu’un pour se souvenir
d’une tranche de pastèque mangée à deux
quand la lumière est à pic
sur les fontaines et à Florence ;
alors, au fond d’un chagrin sans égal,
on peut tenir en respect le Vieillard Temps
et sa manie de tout racler contre les murs ;
mais lui, avec un savoir-faire plus précis
que toutes les insomnies, chope la carte postale,
pisse dessus, et entre deux rires :
« Crétin, ça un événement ? Tu n’es même pas
capable de te rejoindre, tu as livré
ton cul aux mouches et tu te plains de la destinée !
Tout le monde a, comme moi,
d’abord été ce jeune homme qui passe,
en équilibre sur la roue, avec la réussite
pour l’an qui vient ; la suite,
c’est ce qu’on perd entre les jours et l’ombre,
à trop tailler le buisson des voyelles,
et c’est toujours trop tard ;
[...]
Hédi Kaddour, paru dans Action poétique n° 116 (le vers en 1989), in Pascal Boulanger, Une « Action poétique » de 1950 à aujourd’hui, une anthologie, Flammarion, 1998, p. 506.
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