Extraordinairement doué,
brillant, être de culture, d’énergie, d’humour, désinvolte et souvent
excentrique, Jean-Paul de Dadelsen est
ainsi évoqué par la plupart de ceux qui
l’ont connu. Ignorant souvent que l’homme composait parallèlement à cette vie sociale
engagée et exposée une impressionnante œuvre poétique.
Une œuvre dont je
m’étonne qu’elle ne soit pas plus connue, plus diffusée, tant le
Poésie/Gallimard publié aujourd’hui a représenté pour moi un choc. Je l’ai lu
d’une seule traite, quasiment, me réservant d’en explorer petit à petit toutes
les richesses. On trouve dans ce livre une extraordinaire interrogation sur la
vie, la mort, le destin, pétrie d’accents bibliques, d’allusions à la musique, aux poètes allemands (Hölderlin
notamment), une poésie extraordinairement forte et personnelle qui vous happe
et ne vous lâche plus. Pourtant qu’ils semblent étrangers les uns aux autres
les thèmes des recueils rassemblés ici : depuis le somptueux Bach en
automne qui évoque la figure de
Bach à la fin de sa vie, jusqu’à Mort de la femme du pharmacien, depuis les accents métaphysiques et les adresses
à un Éternel absent ou silencieux jusqu’aux moqueries et jeux de langage,
depuis des vers réguliers et les formes classiques incluant même à l’occasion
une villanelle et une sextine jusqu’au texte d’une seule coulée versifiée, sans
majuscules et sans ponctuation de Tombeau personnel. Sans parler des quelques poèmes écrits
directement en anglais, Dadelsen étant agrégé d’allemand mais également marié à une Anglaise et aussi fin connaisseur d’une langue que de l’autre.
Paradoxes multiples et
fascinants donc de l’homme et de cette œuvre grandiose, cachée, qui suscita
l’intérêt de Camus dès que Dadelsen lui montra Bach en automne, et celle de Henri Thomas qui s’attacha à la
publier.
Il n’est que regarder la liste des
participants de l’émission de France Culture programmée vendredi 16
septembre 2005 pour comprendre à quel niveau se situe ce livre qui regroupe
l’essentiel de l’œuvre de Dadelsen. Avec des introductions de Henri Thomas et
de Denis de Rougemont pour la première partie et les notes de Baptiste-Marrey
pour la seconde partie. Car à l’occasion de la réédition de ce livre (paru une première fois en Poésie/Gallimard en 1987), dix-sept
textes et poèmes au texte établi et annoté par Baptiste-Marrey ont été ajoutés à
l’ensemble du corpus. Ils proviennent du volume intitulé Goethe en
Alsace édité par Le Temps qu’il
fait en 1995.
A noter : les vers
souvent très longs de Dadelsen, qui
tenait par dessus-tout au respect de sa prosodie, ont imposé une inhabituelle
impression dans le sens dit « à l’italienne ». Cela ne nuit en rien à
la lecture, je peux en témoigner.
©florence trocmé
Lire
la fiche bio-bibliographique de Jean-Paul de Dadelsen
Lire un
extrait de Bach en automne paru
dans l’anthologie permanente de Poezibao
Jean-Paul de Dadelsen
Jonas suivi de Les Ponts de Budapest
et autres poèmes ; présenté par
Henri Thomas et Denis de Rougemont. Édition des Ponts de Budapest et
autres poèmes par
Baptiste-Marrey , Collection Poésie/Gallimard N° 405, 2005
isbn 2-07-030782-4
6 ,70 €
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