A la suite de ma recension, hier sur
Poezibao, du numéro 7
de la revue siècle 21 et de la
présentation de son dossier sur la littérature post-apartheid en Afrique du
Sud, un texte d’un écrivain qui figure dans ce dossier, Antje Krog. Sa poésie a
été portée à la connaissance des lecteurs francophones par les Éditions Le
Temps qu’il fait en 2004.
MAMAN RENTRERA TARD
que je revienne vers vous
fatiguée et sans souvenirs
que s'ouvre la porte de la cuisine je
m'insère avec des ballots de cadeaux hâtifs
dans les couloirs rôdent les rêves
tristes de ma famille les vitres incrustées
de leur langue délaissée à la lumière
crue de la salle de bain me lave les dents
me colle une pilule sur la langue : Agis.
que je passe devant ma fille endormie
ses draps bien aplatis sous le menton
sur la coiffeuse des vers à soie couvés d'or
que je franchisse mes garçons
les poings froncés dans les coussins
leur chuchotement agité blesse la chambre
que je froisse une chemise de nuit dans le tiroir
l'enfile dans le noir empatté derrière ton dos
que m'inonde la chaleur
ne me fais ni poète ni humain
dans l'embuscade de la respiration
je meurs en femme.
Antjie Krog, Ni pillard, ni fuyard, poèmes traduits de l’afrikaans par Georges-Marie Lory, Le temps qu’il fait, 2004, p.
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