Comme à son habitude, la
revue Europe consacre dans son
numéro d’octobre 2005 un fort dossier à un sujet ou à un auteur, ici Lorand
Gaspar.
Poète, chirurgien,
photographe, Lorand Gaspar est un homme qui « dit oui » selon la
belle expression de Madeleine Renouard qui a coordonné ce dossier et qui mène
en ouverture un entretien avec le poète, reprenant une rencontre de 1995, la
relisant et l’amplifiant en 2005, ce qui permet de mettre en évidence un nouvel
axe majeur dans la recherche de Lorand Gaspar, qui se dit en permanence
« sur le chemin d’une meilleure connaissance de la nature humaine ».
Connaissance bio-physiologique bien sûr par sa fonction de médecin, mais aussi
ancrée dans la tradition philosophique avec sa lecture approfondie et décisive
de Spinoza. Quête incessante qui le conduit aujourd’hui à explorer le champ de
la TNCC, thérapie neuro-cognitive et comportementale qui s’appuie sur les plus
récentes découvertes des neurosciences sur le cerveau, via l’utilisation de
l’imagerie médicale. : c’est, dit-il, « une psychologie du contenant liée à l’héritage biologique et à l’usage que
nous faisons de nos différentes structures cérébrales ».
Cet entretien est suivi
de quelques très beaux poèmes inédits de Gaspar, d’extraits de ses Feuilles
d’hôpital et enfin d’un article
démontrant plus encore son ouverture et sa curiosité d’esprit sur le
compositeur contemporain György Kurtàg.
Les différentes
contributions autour du poète sont d’intérêt assez inégal. J’ai pour ma part
retenu plus particulièrement l’article « Des notes au poème » qui
intéressera certainement tout écrivain car il montre le chemin qui va du carnet
de notes au texte abouti. Très remarquable aussi l’article de Michel Ledoux qui analyse en profondeur le nouveau champ exploré par Gaspar « La création,
de Spinoza aux neurosciences », complété par la contribution
« Finitude, joie, salut » de Maxime del Fiol qui revient en
particulier sur la question de la transcendance et de l’immanence chez Lorand
Gaspar.
A lire aussi absolument
la « Lettre à Lorand Gaspar » de Michel Deguy, lettre sombre et
lucide qui revient sur une longue amitié et qui développe des points de vue sur
la situation du monde que l’on craint prémonitoires « plus
brièvement : il se fait tard », et posant à plusieurs reprises, comme on allume un fanal dans
l’obscurité la question lancinante : « Et la poésie ? ». Autres hommages intéressants,
ceux de Peter Riley et Khaled Najar. Madeleine Renouard clôt le dossier par une
chronologie bien utile tant la vie de l’écrivain est riche, complexe,
itinérante…..
D’un contenu toujours
aussi riche (on ne dira jamais assez l’importance et l’ouverture de la revue Europe), un cahier Don Quichotte, que l’on pourrait
intituler Lectures modernes de Don Quichotte, avec un très bel article de
François Bon, une section Écrivains de Roumanie où j’ai remarqué
particulièrement la poète Simona Popescu et les habituelles chroniques et notes
de lecture.
Le n° 918 d’Europe répond
bien à une de ses vocations : faire le point sur les dernières avancées
concernant un grand auteur, ici Lorand Gaspar et ouvrir le lecteur français,
souvent un peu frileux, sur les littératures d’autres pays.
©florence trocmé
Revue Europe, n° 918, octobre 2005.
sur Lorand Gaspar, dans Poezibao
Fiche bio-bibliographique, extrait 1, extrait 2, extrait 3, extrait 4, extrait
5(parution Europe),
Commentaires