(Je dédie le choix de ce poème à Samuel Rosengarten, † en 1918 et inhumé au cimetière
américain du Mont Valérien, à Paris)
FT
Aux ombres
parfois penchées sur notre épaule
(ironiques ou encore sévères)
et notamment à
Maurice Adrey, soldat, peintre
Louis B., soldat
Richard de K.dit s., soldat, médecin
Jean Labril, soldat, musicien
Jean-Marie L., soldat
Invocation Liminaire
Ils ont habité avec nous dans la gueule de la baleine.
La baleine les a crachés sur l'autre rivage :
Les timides.
Les gauchers.
Celui qui était albinos et bègue.
Les myopes. Les méfiants, les malins.
Et ce grand garçon qui avait toujours soif,
toujours sommeil.
Regardent-ils parfois par-dessus notre épaule ?
Depuis qu'ils sont partis, nous n'avons vu personne.
Sommes-nous aveugles ? Ou bien
"spiritisme, religions de nègres", écrit,
dans quelque périodique exquis, un Révérend Père.
Pourtant,
s'ils regardaient, parfois, par-dessus notre épaule ?
Ou bien quittant le rivage de la mer intermédiaire,
se sont-ils avancés depuis longtemps
dans l'intérieur des terres spirituelles ?
Le sorcier noir sait appeler, sait, quand elles voudraient
s'en aller, retenir, ramener les ombres, les âmes.
Qui de nous saurait appeler
saurait ramener
l'ombre de John,
de Bernard,
de Maurice ?
Jean-Paul de Dadelsen, Aux ombres,
in Jonas, Jonas, suivi de Les ponts de Budapest et autres
poèmes, Poésie/Gallimard, n°405, 2005, p. 87 et 88
Jean Paul de Dadelsen dans Poezibao :
Fiche
bio-bibliographique
extrait
1 (Bach en automne),
Jonas
(fiche de lecture),
extrait
2 (Bach en automne),
extrait
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