Il reste encore une
petite semaine aux parisiens pour découvrir la très belle exposition d'Anne
Slacik, (peintures, œuvres sur papier et livres peints) "Le jardin
cirripède".
Je l'ai découverte pour ma part samedi dernier avec un très grand bonheur,
celui de voir alliées peinture et poésie, de façon rare, féconde et belle.
J'ai eu une longue conversation avec Anne Slacik qui fête actuellement vingt ans de livres peints, une activité dont l'exposition présente quelques superbes spécimens (je rappelle qu'une grande exposition de ces livres a également lieu à Strasbourg* jusqu'au 4 mars)
J'ai pu mesurer la très belle connaissance que le peintre a du monde de la poésie et l'importance des contacts qu'elle a su tisser avec nombre de poètes parmi les plus importants. Qu'il me suffise d'énumérer quelques-uns seulement de ceux et celles avec lesquel(le)s elle a réalisé des livres manuscrits : Adonis, Bernard Chambaz, Marie-Florence Ehret, Véronique Vassiliou, Cole Swensen, Jean-Gabriel Cosculluela, Jamel Edine Bencheikh, Tita Reut, Lucie Petit, Claude Minière, Jacques Ancet, Antoine Emaz, Sylvie Fabre G., Bernard Noël, Michel Butor, Lionel Bourg, Salah Stetié, Sophie Loizeau, Claire Malroux, Valérie Rouzeau, Jean Portante, Pierre Alain Benoît, Laurent Grisel (liste où l'on aura reconnu de très nombreux auteurs amis de Poezibao).
Mais quid de ces "manuscrits peints"? : en fait à chaque fois une aventure étonnante et non sans risques puisque Anne Slacik envoie au poète un support vierge, à charge pour l'auteur d'y inscrire un texte où il veut, comme il veut, avec l'instrument de son choix. Anne Slacik peint ensuite directement (pigments et liant acrylique la plupart du temps) avec, autour, sur ce texte. Les livres ainsi produits sont uniques ou réalisés à un tout petit nombre d'exemplaires, les textes sont souvent originaux ou repris d'éditions épuisées ou difficiles à trouver.
Anne Slacik travaille
aussi avec quelques éditeurs, toujours dans la même démarche de peindre sur le
livre, avec cette seule différence qu'ici le texte est imprimé.
Je reproduis ici quelques mots de René Pons, dans le catalogue d'une exposition
Anne Slacik à Alès :
"Anne Slacik
prolonge ce travail d'élargissement du champ de la peinture dans de nombreux
manuscrits peints, c'est-à-dire dans des espaces où elle provoque une création
dans la rencontre, proposant à l'écrivain un livre vierge sur lequel elle
interviendra en fonction de la proposition spatiale et textuelle de cet écrivain
qui la précède dans son intervention. Cet espace, ce vide papier que sa blancheur
défend, si l'écrivain joue pleinement
le jeu proposé, va générer un texte écrit pour la circonstance. Ainsi va
s'établir, entre l'artiste et l'écrivain, une sorte de dialectique. Il ne
s'agit évidemment pas d'une illustration mais d'une osmose entre les co-auteurs
du manuscrit, l'un laissant la trace de son pinceau, l'autre de sa graphie
singulière, cette partie de nous-mêmes dont le monde moderne nous prive de plus
en plus, l'écriture manuelle disparaissant peu à peu. L'objet ainsi obtenu
n'est ni un livre ni un tableau mais les deux à la fois d'où les façons
multiples dont on peut le présenter.
On peut voir ici (sur le site d'Anne Slacik) la quasi intégralité des livres peints
"Le Jardin Cirripède"
Anne Slacik, peintures, œuvres sur papier et livres peintes
Galerie Michèle Broutta
31 rue des Bergers – 75015 Paris
jusqu'au 25 février 2006, du mardi au samedi de 10 à 13 heures et de 14 à 19
heures.
"Excepté peut-être une constellation"
Anne Slacik – Livres peints 1986-2006
Bibliothèque Municipale de Strasbourg
du 10 février au 4 mars 2006
Photos ©florence trocmé, de haut en bas :
Les insomnies du pigeon voyageur, de Tahar Bekri, peint par A. Slacik, 2005
VA, de Tita Reut, peint par A. Slacik, 2004
Un jour, de René Pons, peint par A. Slacik, 2005
Deux livres de Sylvie Fabre G. (à gauche) et de Lucie Petit
Anne Slacik dans l'exposition de la Galerie Michèle Broutta, le samedi 18 février 2006
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