4. "il faut te dire, Boris, que je n'aime pas
la mer" écrivait Marina à Boris Pasternak.
Elle séjournait pourtant au bord de l'océan, à Saint-Gilles-sur-Vie.
Venue là de Paris, pour passer des vacances ?
Elle est déjà exilée, que venait-elle chercher au sud de Noirmoutier ?
Dans ce bourg qui s'appelle à présent Saint-Gilles-Croix-de-Vie, "dénué de
panache, buissons, sables et croix", elle court voir si laVie remonte ou
redescend.
La Vie est la rivière.
On dit parfois : la vie est un long fleuve.
Lorsqu'on est en Bretagne, elle est plutôt la mer qui arrive et repart, qui
dénude la terre, qui la transforme en sol de lune, puis qui revient, qui la
recouvre.
Les yeux l'identifient quand elle a disparu, identifient le manque d'elle, à
cause des presqu'îles et des îles bleutées qui marquent sa limite, ou le début
du ciel.
La mer, dit Marina, elle est insurmontable et humiliante.
"…. la dictature, Boris, et la fierté blessée."
En attendant qu'elle revienne, ce qui semble jamais, la vase a pris la place,
elle miroite comme l'eau.
Quelques rochers très noirs cassent sa platitude, on les croirait à
contre-jour, on se croirait au crépuscule, près d'un cratère, d'une terre
pétrifiée.
Cependant la lumière vient d'en haut, à travers une brume invisible.
Marie Etienne, Roi des Cent Cavaliers, Flammarion, 2002, p.
12.
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bio-bibliographique de Marie Etienne
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