Quarante ans de poésie et plus de quatre cents livres publiés, qui peut se targuer d'un tel palmarès, si ce n'est la collection «Poésie/Gallimard». A tel point qu'on se pose la question de savoir s'il existe un équivalent à cette collection dont les livres sont proposés à un prix très abordable, ailleurs dans le monde.
Poésie/Gallimard publie aussi bien les oeuvres des poètes classiques que
celles des grands contemporains, avec cette indication importante que pour la plupart des auteurs consacrés, la règle
est de donner leurs recueils en version intégrale.
Apollinaire, Cendrars, Breton, Eluard, Aragon, Saint-John Perse, aussi bien que
Verlaine, Laforgue, Charles Cros ou Lautréamont sont donc publiés avec toutes
les garanties qu'offrent des éditions critiques : c'est exemplairement le cas
de Hugo, Baudelaire, Nerval ou Mallarmé.
Le domaine étranger est largement représenté, parfois dans des éditions
bilingues, par Rilke, Lorca, Borges, Pasternak, Keats, Milton, Dickinson,
Whitman, Pessoa, Trakl, Neruda, Maïakovski, Tsvétaïéva, et la rencontre de
Char, Artaud, Jouve, Reverdy, Michaux, Catherine Pozzi, André Frénaud, Yves
Bonnefoy, Philippe Jaccottet, André du Bouchet, Lorand Gaspar ou Bernard Noël
avec Charles d'Orléans, Louise Labé, Ronsard, Théophile de Viau, Rimbaud ou
Valéry, comme avec la poésie arabe (Adonis, Darwich), bengalie (Tagore),
persane (Omar Khayam), turque (Hikmet), suédoise (Tranströmer), italienne
(Dante, Stampa, Ungaretti, Luzi), japonaise, chinoise, russe, yiddish, tchèque
ou grecque, donne à cette collection l'allure d'un périple dans la poésie
universelle. Et d'une vraie encyclopédie en devenir.
Aux anthologies de référence, qui suivent le rythme des siècles, s'ajoutent
désormais des ouvrages qui privilégient d'autres approches, soit en célébrant
une forme (Soleil du Soleil - le sonnet de Marot à Malherbe -, Haiku -
anthologie du poème court japonais, ou Les Poètes du Tango), soit en
ressuscitant un lieu (Les Poètes du Chat Noir), soit en renouant avec une
aventure fulgurante (Les Poètes du Grand Jeu).
Historique de la collection
Poésie/Gallimard fut la première
collection française de grande diffusion à se consacrer exclusivement à la
création poétique. Les trois premiers volumes paraissent en mars 1966 :
Paul Éluard Capitale de la douleur suivi de L’amour la poésie ; Frederico Garcia Lorca, Poésies ; Stéphane Mallarmé, Poésies.
La maquette de couverture est une création de Massin ; elle donnera lieu à
quelques aménagements au début des années quatre-vingt-dix, offrant plus de
liberté dans le traitement graphique de l’illustration.
L’éditeur Robert Carlier et le poète Alain Jouffroy en partagent d’abord la
direction – avant que le premier ne l’assume finalement seul. Jusqu’en 1971,
seuls des titres d’auteurs du XXe siècle sont édités, principalement
du fonds Gallimard :
Les auteurs peuvent prendre part à la composition du volume ; en 1970, Aragon, pour Le
Mouvement perpétuel, donne dix
pages inédites d’écritures automatiques, tandis qu’Aimé Césaire retravaille
profondément son texte des Armes miraculeuses. Avec l’édition de recueils d’Yves Bonnefoy, de
Jean Grosjean, de Guillevic, de Philippe Jaccottet, de Georges Schéhadé ou
d’Henri Thomas (…), Poésie/Gallimard amplifie l’audience des auteurs
contemporains, les révélant à des publics qu’ils n’avaient encore pu toucher
par la voie des premières éditions et des revues. L’appareil critique
accompagne cette diffusion ; on pense, par exemple, à la présentation en 1971
par Jean Starobinski des Poésies de son compatriote Philippe Jaccottet – ce
dernier présentant à son tour, trente ans plus tard, celles du suisse Gustave Roud. Suite à la rupture de relations
commerciales entre Gallimard et Hachette en 1971 (et donc de l’interruption de
leur collection commune «Le Livre de poche classique»), les auteurs des siècles
précédents font leur entrée, de Villon à Lautréamont. Simultanément, le format
et le papier de la collection s’alignent sur la nouvelle collection «Folio». Le
critique d’art André Fermigier en assume désormais la direction ; il inscrit à
son programme de nombreux auteurs contemporains, dont Alain Bosquet, Lorand
Gaspar, Édouard Glissant, Michel Butor, Michel Deguy Jacques Réda, Georges
Perros, Jacques Roubaud… On lui doit également la publication d’œuvres d’Henri
Michaux à titre posthume, le poète s’étant refusé de son vivant à toute
publication en poche.
De 1966 à 1991, la collection publiera environ trois titres par an d’auteurs
étrangers. Cette orientation est largement confirmée à partir de la fin des
années 1980, sous les directions successives de Jean-Loup Champion et du
germaniste et philosophe Marc de Launay : Adonis, Octavio Paz, Miguel Ange
Asturias, Georg Trakl, Dylan Thomas, Eugenio Montale et de nombreux classiques
allemands font leur entrée au catalogue. Outre une attention renouvelée pour les poètes contemporains français et
étrangers, André Velter depuis 1998 multiplie les approches singulières,
transversales et anthologiques : par genres ou motifs (le sonnet avec Soleil du
Soleil, le haïku avec l’Anthologie
du poème court japonais), par
nationalité ou domaine linguistique (Anthologie de la poésie Yiddish ; Anthologie
de la poésie grecque contemporaine ; Anthologie de la poésie tchèque contemporaine) par génération ou groupe de poètes (Les
Poètes du Chat noir ; Les
Poètes du Grand Jeu) sans oublier les oeuvres inclassables (Henry
Levet, Catherine Pozzi, Ghérasim Luca,
Jean-Pierre Verheggen, Valère Novarina) ni les rééditions revues et augmentées
d’auteurs essentiels (Nerval, Reverdy).
Un nouveau catalogue de la collection sera édité à l'occasion de ce quarantième anniversaire.
Annoncés en mars
Blaise Cendrars, Du monde entier au cœur du monde, Poésies
complètes préface de Paul Morand, Nouvelle édition en un
volume de Claude Leroy
Jacques Roubaud, La forme d’une ville change plus vite, hélas, que le
cœur des humains
Collectif, Poètes de la ville, Avant-propos de Jacques
Réda
Commentaires