Pour marquer, avec un peu de retard, l'événement éditorial qu'a constitué en 2005 la publication, chez Phébus, d'une œuvre quasiment introuvable en France, malgré l'engouement qu'elle avait suscité dans les années cinquante chez Frénaud, Cocteau, Georges-Emmanuel Clancier, Claude Roy ou encore Guillevic) : Aimez-moi regroupe la quasi intégralité des poèmes du hongrois Attila József, avec un florilège de traducteurs et de traductions et un remarquable ensemble de présentation, préface et notes. Un véritable somme. ..
Élégie (extrait)
Comme la fumée, qu'un ciel de plomb rabat,
Au paysage morne étend sa lourde nappe,
Mon âme flotte
A ras de terre,
Flotte et ne bouge pas.
Penchez-vous, toi, mon âme rude, et toi, ma douce
Imagination, abaissez vos regards
sur les traces dures de la réalité,
sur vous, sur vos origines.
C'est ici. Sous un ciel qui pourrait être fluide,
Dans une solitude de grands murs déserts,
Le silence étouffant de la misère,
Parfois menace, parfois prière,
Délaie lentement la pâte du chagrin
Dans le cœur de ceux qui rêvent
Et puis la mêle
A la peine de millions d'êtres.
Tout l'univers des hommes
Ici se prépare. Ici, tout est ruines.
Un pissenlit raide ouvre son ombrelle
Dans la cour de l'usine abandonnée.
Sur un escalier d'étroites fenêtres
Aux vitres cassées, les jours vont glissant
Jusqu'à des moiteurs obscures.
Réponds.
Es-tu d'ici ?
D'ici tellement que jamais ne te lâche
Le désir grave
D'être pareil à tous les autres misérables,
Ceux-là qui sont la chair de cette grande époque,
Ceux-là dont le visage est abîmé ?
[...]
Attila József, Aimez-moi, Phébus, 2005; p. 355
bio-bibliographie d'Attila József
index
de Poezibao
Sur simple demande à [email protected],
recevez chaque jour l'anthologie permanente dans votre boîte aux lettres
électronique
Commentaires