Ce poème a été composé en 1920, alors que Marina Tsvétaïeva
était sans nouvelles de son mari, S. Efron, depuis trois ans.
Je l’ai choisi à la mémoire de la journaliste russe Anna
Politkovskaya, assassinée samedi dernier dans l’escalier de son immeuble.
Je te vois aux yeux noirs, – séparation !
Élancée, – séparation ! – Solitaire, – séparation !
Avec un sourire étincelant comme un poignard, – séparation !
Tu ne me ressembles pas du tout, – séparation !
Tu ressembles à toutes les mères qui meurent jeunes,
Tu ressembles aussi à la mienne, – séparation !
Tu arranges de même ta voilette dans l’antichambre.
Tu es Anna au-dessus de Sérioja endormi, – séparation !
Parfois tu t’engouffres dans une maison en gitane
Aux yeux jaunes, – séparation ! en Moldave, – séparation !
Sans frapper, – séparation ! Comme un vent de maladie
Fait irruption dans nos veines – une fièvre – séparation !
Et tu brûles, et tu sonnes, et tu frappes, et tu siffles,
Et tu hurles, et tu tonnes et – en soie déchirée –
En loup gris, – séparation ! – qui n’épargne ni l’aïeul ni l’enfant, –
séparation !
Hibou noir – séparation ! Jument des steppes, – séparation !
N’es-tu pas un fils de Razine – aux larges épaules, costaud et roux ?
Ne t’ai-je pas vue en fauteur de pogromes, – séparation ?
De pogromes, qui étripe bétail et édredons ?...
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Aujourd’hui tu t’appelles Marina, – séparation !
Ce poème est donné dans le livre de Véronique Lossky, Marina Tsvétaeva, un itinéraire poétique, Solin, 1987, p. 107
Note
bio-bibliographique, concert-lecture
(05), extrait
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4, extrait
5, extrait
6
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Rédigé par : Florence Trocmé | lundi 16 octobre 2006 à 19h15
Rédigé par : Account Deleted | jeudi 12 octobre 2006 à 15h48