Ce choix d’aujourd’hui pour une double raison (parmi
beaucoup d’autres !) : l’important colloque qui se tient actuellement
à la BNF, site François Mitterrand, Michel
Butor, : déménagements (j’ai pu assister à la première matinée de ce
colloque et vais en rendre compte sur Poezibao)
et parce que l’éditeur La Différence vient de tirer la deuxième salve de sa
magnifique édition complète de l’œuvre de Michel Butor, sous la direction de
Mireille Calle-Gruber, avec deux nouveaux volumes Répertoire 2 et surtout le
premier de poésie, c’est donc le Tome IV, Poésie
1, 1948-1983, un monument de plus de 1000 pages sur lequel je vais revenir
bientôt.
Et
à la réflexion, cette troisième raison, la parution d’un nouveau livre de
Michel Butor, Cantique
de Matisse, dont ce matin, au colloque de la BNF, Mireille Calle-Gruber
a beaucoup parlé et dont elle a lu de magnifiques
extraits
IV
Dans les jardins
Dans les écoles
Pleines de bruits et de sacs lourds
Et anciennes où le soleil
Ne pénètre qu’une fois l’an
Avec hilarité
Bleues comme un lait de chaux
Ou de vieilles figues sèches et acides
Un peu d’eau
Quelques bourgeons de marronnier
Comme des paquebots
Sur lesquels on n’ira jamais
Malgré l’envie
Et les économies
Avec des tours qui fument
Des ananas et des jardins d’hiver
Et comme des livres de messe déchirés
Avec rage et ressentiment et désarroi
Un
jour de Pâques
Comme des surplis tachés de sang miteux
Comme des pyjamas sales
Et des prières qu’on étouffe
Et qui vous étranglent
Pesamment
Savamment
Avec douceurs fades
Et désolation
Comme un loup qui fait un rêve et dit
Je suis une ville et un train
Comme des parents qui essaient
D’intéresser leurs enfants
A leurs histoires sans solution
Comme boire
Comme parler
Comme se taire
Comme suer
Comme tomber
Comme les promesses
Les vieilles promesses
Le jour blanc
Sur le paysage
Qu’on ne regardera pas
Michel Butor, La Banlieue de l’aube à l’aurore,
mouvement brownien, in Poésie 1, 1948-1983, Éditions de la
Différence, œuvres complètes de Michel Butor, tome IV, 2006, p. 164 et 165.
La
Banlieue de l’aube à l’aurore a été publié en 1968 chez Fata Morgana.
Lire un autre extrait de Michel Butor en cliquant sur le lien ci-dessous :
1) Notre-Dame au mur violet (1902)
Je
suis né le 31 décembre 1869 au Cateau-Cambrésis, une petite ville du Nord.
C'était encore le Second Empire. J'ai passé mon enfance parmi les châles des
Indes ornés de palmettes et brodés de franges . Puis ma famille s'est installée
à Bohain en Picardie pour vendre des graines et des couleurs. La fragilité de
ma santé ne m'a pas permis de prendre la succession de mon père comme il
l'aurait voulu, et il m'a envoyé à Paris pour y faire les études de droit qui
m'ont permis de devenir clerc d'avoué à Saint-Quentin. J'avais bien montré
quelque facilité pour le dessin à l'école, mais je songeais si peu à devenir
peintre, cela me semblait tellement en dehors de toute vraisemblance, que lors
de ce premier séjour dans la capitale, je n'avais éprouvé nul désir de visiter
musée ni salon. Un jour pourtant, comme j'attendais au guichet d'une poste,
j'avais griffonné presque sans y penser, sur une formule de télégramme, un
visage dans lequel j'ai reconnu soudain celui de ma mère comme je ne l'avais
jamais vue dans aucune photographie. Et chantait dans mon coeur cette
adaptation du Cantique de Salomon: "que tu es belle, Héloïse ma mère, ton
souffle a le parfum d'un verger". De retour chez elle, pour ma
convalescence après une opération de l'appendicite, elle m'a acheté une boîte
de peinture pour me désennuyer. Je me suis donc efforcé de recopier les
paysages suisses en chromo qui y étaient joints, et cela m'a donné une clé
magique pour quitter ma chambre. Alors j'ai repris le chemin de la capitale et
j'ai eu la chance d'y rencontrer à l'Ecole des Beaux-Arts, -j'avais 22ans-, mon
maître vénéré Gustave Moreau qui un jour, sur le pont à la sortie d'une classe,
m'a dit brusquement: "que cherchez-vous donc? -Je cherche à rendre ce que
les maîtres n'ont pas rendu, par exemple ce qui est devant nous (cet ensemble
du Pont-Neuf avec ses arbres sur le fond de Notre-Dame dans une enveloppe
mystérieuse), cette beauté que les maîtres n'ont pas rendue". Je me suis
toujours méfié des paroles, mais cela ne m'a pas empêché de tenter de répondre
tant bien que mal aux questions que l'on me posait; je me suis même laissé allé
à écrire deux livres: Notes d'un Peintre et Jazz ; et c'est surtout l'écho de
tout cela, transcrit aussi fidèlement que possible, que l'on trouvera dans ces
strophe
Michel
Butor, chant 1 du Cantique de Matisse,
tel que publié sur le site
de Michel Butor mais aujourd’hui également disponible en livre, Éditions Virgile,
2006
Michel Butor dans Poezibao :
Note
bio-bibliographique,
extrait
1, Regards,
regards, ouvrez les yeux / tournez autour….
extrait
2, Trio, dans les touffes de baiser, le palais des
coquilles
extrait
3, Des échelles se dressent entre échafaudages
et démolitions
extrait
4, Exclamations
renversées Une feuille qui vient d’atterrir
/ près de ma semelle
extrait
5, Hamlet 2 Où me conduis-tu / parle
extrait 6, Actualités Le journal quotidien / est comme une fenêtre
extrait 7, Catalogue des jarres 1. Pour conserver les olives
extrait 8, FRANKLIN un couple de bobolinks….
extrait 9 (Seize Lustres), Certains d’entre nous réussissent / à s’en aller au fil de l’eau
annonce édition œuvres
complètes à La Différence,
rencontre avec Michel Butor
à la librairie Compagnie (mars 06),
exposition
à la BNF (été 06), visite
de l’exposition à la BNF,
fiche
de lecture de Don Juan en Occitanie (avec Colette Deblé
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