C’est à
une belle promenade à travers trois livres d’Ariane Dreyfus que nous a invités
hier après-midi 25 octobre 2006 Thérèse Dufresne, en présence de l’auteur, dans
le cadre des Mercredis du Poètes au François Coppée, à Paris.
Promenade
d’autant plus vivante que chacun des trois livres choisis évoque un univers
bien particulier que Thérèse Dufresne, dans sa présentation, a su mettre en
perspective avec les thématiques dominantes d’Ariane Dreyfus.
Le
périple débute par un des premiers livres (paru en 1998, réédité en cette fin 2006 par
Tarabuste dans une version revue et corrigée), La Durée des plantes, « écriture suscitant une approche du
temps par le dedans de la plante » dans une tentative de « déchirer l’impossible
tissu de l’instant ». Immersion dans le végétal : « je suis
heureuse dans les plus petites feuilles », mimétisme du végétal et de l’humain,
rapport de miroir, parenté entre l’humain et les autres règnes : « notre
solitude est un animal qui bouge encore ». Intuitions qu’Ariane Dreyfus étaiera
en disant qu’en effet « tout l’interpelle de ce qu’elle rencontre et que
les plantes la rassurent, car elles sont l’intermédiaire entre elle-même et
quelque chose qui lui fait peur, la terre noire » qui matérialise son
angoisse devant la disparation sous toutes ses formes ; et sa conviction
que la poésie empêche de tomber dans ce trou. Il s’agit d’ « une seule chaleur / Qui courbe les
épines et les garde », vers dont Ariane dira qu’il est emblématique de sa
perception du monde : adoucir les épines mais ne pas nier leur existence.
C’est un
tout autre monde qui est évoqué à travers le second livre choisi Une Histoire passera ici. (Flammarion,
1999). Univers du cinéma, univers des westerns, ceux de John Ford en
particulier, leur temps immédiat et éternel où ce qui retient le plus la poète
est l’évocation de la vie quotidienne des héros. Et c’est encore un autre monde
qui structure le troisième recueil dont il sera question, Les Compagnies silencieuses. Ici c’est le monde de la danse qu’Ariane
Dreyfus invoque mais il ne faut pas perdre de vue que quel que soit le thème,
il est prétexte à explorer les leitmotivs fondamentaux que sont l’enfance, la
mort, l’amour, le temps. « L’enfance erre, nous ne savons pas repousser
ses retours », l’enfance, son univers, celui que tout écrivain retrouve,
transforme, remodèle, ses émotions enfouies, entassées dans le grenier de l’oubli.
Évocation des danseurs et chorégraphes Dominique Bagouet ou Dominique Hervieu,
contraste des textes tels "Kosovo XXe siècle" et "Adage",
lus par Ariane Dreyfus, d’un côté l’évocation presqu’impossible d’atrocités, de
ce camion qui veut écraser l’enfant (« la folie ne peut pas rentrer dans
les livres »), de l’autre une suite de pas et de mouvements lents,
exécutés sur le rythme d'un adagio, à titre d’exercice dans le cadre d’une
répétition de danse : corps torturés, déplacés d’un côté, corps travaillés
de l’autre, mais toujours corps.
Ariane Dreyfus clôt les deux
heures de ce bel échange en lisant plusieurs extraits de son dernier livre L’Inhabitable, livre de l’amour, du
désir et du sexe, de l’amitié aussi pour
le poète Stéphane Bouquet avec au cœur même des poèmes entremêlement de leurs
deux voix. Elle termine sur une "anthologie de baisers" car « il
n’y a que les baisers qui comptent / C’est pour ma mort ce trésor ».
©Poezibao-florence
trocmé
Photos ©florence trocmé, de haut en bas Ariane Dreyfus, Ariane Dreyfus et Thérèse Dufresne et Thérèse Dufresne
Ariane Dreyfus dans Poezibao :
Ariane Dreyfus dans Poezibao :
note
bio-bibliographique, extrait
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