Jacmo se montre rassurant : Décharge repart
pour un an et la file d’attente au portillon de la revue augure d’une excellente
santé. Avec une régularité de métronome cette publication donne chaque
trimestre le pouls de la création poétique. Ce numéro hivernal accorde un
entretien à Albane Gellé qui a choisi de se consacrer entièrement à l’écriture,
renonçant ainsi à toute activité professionnelle qui en serait séparée. Au
travers de résidences et d’interventions publiques diverses elle extrait du
« désordre » de son environnement immédiat ou plus lointain la pâte
d’une langue qu’elle travaille avec la distance du créateur. Militante active,
elle a créé à Saumur une structure : littératures & poétiques,
lieu de rencontres et de croisements appelé à recevoir des écrivains divers, en
compagnie de leurs éditeurs. L’association a également constitué une bibliothèque
de revues littéraires afin de permettre une lisibilité immédiate de ce
foisonnement revuistique dont l’accès, par ailleurs, demeure trop confidentiel.
En complément, une petite librairie reçoit des dépôts d’éditeurs de poésie, en
dehors de tout esprit de chapelle. Au terme de l’entretien, Albane Gellé
confesse toutefois une certaine lassitude de la poésie, une impression
d’overdose, de saturation, de retrouver les mêmes choses chez beaucoup, les
mêmes choses graves et lourdes, les mêmes mots, les mêmes formes…Un constat
sur lequel on pourrait épiloguer… Jean-Baptiste Para a choisi de présenter et
de traduire « trois poètes italiens d’aujourd’hui » : Lucio
Mariani (né en 1936), Valerio Magrelli (né en 1957) et Antonella Anedda (née en
1958). Tous trois romains d’origine, ils ont aussi en commun, selon
Jean-Baptiste Para, un constant souci du monde, selon trois lignes de
tangence entre le poème et le temps où il nous est échu de vivre.
L’occasion, en tout cas, de découvrir une vingtaine de poèmes dans une superbe
traduction de Jean-Baptiste Para qui dirige, par ailleurs, la revue Europe.
Claude Vercey revient – était-ce bien opportun ? – sur une polémique
engagée par François Huglo qui s’estime « censuré » à la suite du
refus de Daniel Martinez, directeur de la revue Diérèse, de publier à la
suite l’intégralité de la correspondance – en tout 432 lettres – que lui adressa Jean Rousselot. Certaines de
ces lettres renfermeraient, selon Daniel Martinez, des propos antisémites ou de
complaisance avec l’extrême-droite. À défaut de posséder tous les éléments
objectifs du dossier, le lecteur hésitera à prendre parti, comme d’ailleurs
Claude Vercey, « agitateur prudent ». Quoi qu’il en soit, l’affaire
ne me paraît pas assez grave pour mériter de telles coulées d’encre et encore
moins pour provoquer des querelles entre des animateurs méritants de la sphère
poétique.
©Alain Helissen
Abonnement 2007 : 22 euros.
ndlr : il faut aussi attirer l’attention sur les images qui
ponctuent ce numéro, des gravures impressionnantes de Hugues Weiss dont la
couverture permet de se faire une idée.
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