II
Les métamorphoses de la
main
Un gros plan de la main en arrêt sur
une rive provisoire : un vague continent
pourrait se mettre à bouger, articuler,
dériver. On interprèterait ce rapprochement
légitime : une fausse note
(un enfantillage quand on touche, et qu’il
ne faut pas ; une femme suce son pouce gauche,
et il ne faut pas ; elle s’absente dans un geste
désert qui lui fait perdre le sens de la rive ;
elle est de marbre blanc, réduite à l’état
de lignes et de formes, portrait de femme
à la main, sans attente hors d’atteinte
et il ne faut pas),
*
Ce qui entraînerait la rupture ; ce qui,
subitement, détruirait l’équilibre
(je ne suis là pour personne ni pour
moi-même, dépaysée, un peu floue dans l’oubli
d’un corps que l’inertie de la main tient
éloigné de l’irruption ou de la répétition
de la chute. Moment essentiel où je ne suis
que surface étonnante, odorante, sans
rien en moi qui résiste à l’aplanissement
de la figure vertigineuse de ces lieux
dans lesquels il m’arrive si souvent d’être piégée
parce qu’une
*
simple vague sur le vernis de la surface,
un effleurement un peu gauche, et
le seul mot qui me vient
est le mot : déchirure.
[…]
Denise Desautels, Mémoires parallèles, choix de poèmes, choix et présentation de Paul Chamberland, Éditions du Noroît, 2004, p. 80
Denise Desautels dans Poezibao :
Note
bio-bibliographique,
extrait
1, extrait
2, extrait
3, extrait
4, extrait
5
index de Poezibao
Revenir à la Une de Poezibao
Sur simple demande à [email protected], recevez chaque jour l'anthologie permanente dans votre boîte aux lettres électronique
Commentaires