Cinq traductions du
poème 465 (écrit en 1862 ; Cahier 26) d’Emily Dickinson.
J’entendis une Mouche bourdonner – quand je mourus–
Le Calme dans la Chambre
Était comme le Calme dans l’Air –
Entre les Soubresauts de l’Orage –
Les Yeux alentour – essorés, secs –
Et les souffles retenus
Pour le dernier Assaut – lorsque le Roi
Apparaîtrait – dans la Chambre –
Je léguais mes Menus Objets – et Donnais
Cette part de moi
Qui se peut donner – et c’est lors
Qu’une Mouche s’interposa –
Avec un Bourdonnement Bleu – incertain, trébuchant –
Entre la lumière – et moi –
Et puis les Vitres s’évanouirent – et puis
Je n’y vis plus pour voir –
Emily Dickinson, Twenty poems, Vingt
poèmes, [édition bilingue] présentation de Paul Zweig, traduction de C.
Berger et P. Zweig, dessins de Michèle Katz, éditions Minard, 1963, p. 29.
Une Mouche bourdonnait
– quand je suis morte
Une Mouche bourdonnait – quand je suis morte –
Le Silence de la Chambre
Était comme le Silence de l’Air
Entre les Sautes de l’Orage.
Les Yeux autour de moi – s’étaient drainés à sec–
Et les Souffles se raidissaient
Pour le dernier Assaut – lors duquel le Monarque
Serait là – dans la Chambre –
Je léguais mes Souvenirs – je me défis
De cette part de moi qui se pouvait
Attribuer – et c’est alors
Qu’une Mouche s’interposa –
Avec son Bourdon Bleu – incertain, trébuchant –
Entre le jour – et moi –
Ensuite les fenêtres m’échappèrent – ensuite
Je perdis le pouvoir – de voir –
dans Pierre Leyris, Esquisse d’une
anthologie de la poésie américaine du XIXe siècle, édition
bilingue, Gallimard, 1995, p. 303.
J’ai entendu le bruit d’une Mouche – en mourant –
Le Silence dans la Chambre
Était comme le Silence de l’air –
Entre les Bouffées de Tempête –
Les Yeux autour – en étaient secs –
Et les Souffles se recueillaient
En vue de l’ultime Assaut – quand la Reine
Serait vue – dans la Chambre –
J’ai légué ce qui m’était Cher – Cédé
La partie de moi-même
Cessible – Et c’est alors
Qu’une Mouche s’est interposée –
Avec un Bruit Bleu, incertain, trébuchant –
Entre la lumière – et moi –
Ensuite les Fenêtres sont devenues floues
Et j’ai perdu de vue la vue –
Emily Dickinson, Le Paradis est au choix,
The Paradise is of the option, [édition bilingue] traduit et présenté par
Patrick Reumaux, Librairie Élisabeth Brunet, 1998, p. 153.
J’entendis bourdonner une mouche à ma mort.
Le calme de la chambre
Rappelait le calme de l’air
Entre les sursauts de l’orage.
Alentour les yeux s’étaient vidés.
On fortifiait son souffle
Pour l’ultime assaut, où le Roi
Apparaîtrait dans la chambre.
J’avais donné mes souvenirs, légué
Ce qu’on pouvait léguer de moi,
Et c’est alors qu’une
Mouche s’interposa –
Bleu bourdonnement, trébuchant, incertain,
Entre la lumière et moi –
Et puis les vitres me manquèrent, et puis
Je n’y vis plus assez pour voir.
Emily Dickinson, Poèmes, Poems, Texte
original et version française par Guy Jean Forgue, Aubier, 1970, p. 115.
J’entendis bourdonner une Mouche – à ma mort –
Le Silence dans la Pièce
Était pareil au Silence de l’Air –
Entre les Râles de la Tempête –
Les Yeux à la ronde – s’étaient taris –
Les Souffles rassemblaient leurs forces
Pour l’ultime Assaut – quand le Roi
Ferait son entrée – dans la Chambre –
Je léguai mes Souvenirs – d’une Signature
Cédai la part de moi
Transmissible – et c’est alors
Qu’une Mouche s’interposa –
Un incertain, trébuchant – Bleu Bourdonnement –
Entre la lumière – et moi –
Alors les Vitres se dérobèrent – alors
La vue me manqua pour voir –
Emily Dickinson, Une âme en incandescence
(Cahiers de poèmes 1861-1863), [édition bilingue] traduit et présenté par
Claire Malroux, José Corti, 1998, p. 329.
I heard a Fly buzz – when I died –
The Stillness in the room
Was like the Stillness in the Air –
Between the Heaves of Storm –
The Eye around – had wrung them dry –
And Breaths were gathering firm
For that last Onset – when the King
Be witnessed – in the Room –
I willed my Keepsakes– Signed away
What portion of me be
Assignable – and then it was
There interposed a Fly –
With Blue – uncertain stumbling Buzz –
Between the light – and me –
And then the Windows failed – and then
I could not see to see –
Emily Dickinson, The Complete Poems,
Edited by Thomas H. Johnson, Faber and Faber, 1975 (1970), p. 223-224.
Contribution de
Chantal Tanet et Tristan Hordé
Emily Dickinson dans Poezibao :
Bio-bibliographie
extrait 1, extrait 2, extrait 3, extrait 4, extrait 5, extrait 6, extrait 7, extrait 8, extrait 9, extrait 10, extrait 11,extrait 12, extrait 13
Chambre avec vue sur
l'éternité (lecture de F. Trocmé),
entretien avec Claire Malroux autour d’Emily Dickinson,
Une rencontre avec Marilyn Hacker et Claire Malroux
La femme sans paroles (lecture F.Trocmé)
Lieu dit l’éternité, Points,
présentation,
Car l’adieu, car la nuit (parution),
Y aura-t-il pour de vrai un matin (parution)
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