Pour le choix des textes de cette anthologie permanente
d’été, Poezibao suivra encore cette
semaine (avant une pause de quinze jours), le fil du livre de Jean-Claude
Mathieu, Écrire, inscrire, sous titre
″Images d’inscriptions, mirages d’écriture″ (éditions José Corti 2010).
Jean-Claude Mathieu, sur la trace des « inscriptions » cite
d’innombrables poètes. Poezibao
reprend certaines de ces citations et tente de les compléter, chaque fois que
possible, par d’autres textes du même auteur.
•La citation d’Écrire Inscrire
[chapitre « Une tempête sur la page »]
« La prophétie d’une apocalypse où triomphera l’innommable est l’horizon
du poème de Michaux, ″L’Avenir″. Des exclamations, ″Malédiction″, ″Malheur !″ lui
suffisent souvent pour jeter l’anathème, exorciser la souffrance. Ici l’écrasement,
l’infection pèsent sur le bégaiement d’une parole qui s’enfle sans parvenir à expulser
cette masse stercoraire. Elle pourrit en amalgament toutes les réalités
collantes qui répugnent à Michaux, la ″colle des mots″, les ″marécages″ de Mes Propriétés, les maharadjahs si
poisseux du Barbare en Asie,
agglutinés dans les crases de cette Apocalypse :
L’AVENIR
Quand les mah,
Quand les mah,
Les marécages,
Les malédictions,
Quand les mahahahahas,
Les mahahaborras,
Les mahahamaladihahas,
Les matratrimatratirhahas [...]
Quand l’épouvantable-Implacable
se débondant enfin,
Assoira ses mille fesses infectes sur ce monde fermé, centré
et comme pendu au clou [...]
Oh ! Malheur ! Malheur ! »
Jean-Claude Mathieu, Écrire inscrire,
José Corti, 2010, p. 241
Citation : Henri Michaux, La Nuit
remue, Gallimard, p. 189.
•Trois autres textes d’Henri Michaux
CONTRE !
Je vous construirai une ville avec des loques, moi !
Je vous construirai sans plan et sans ciment
Un édifice que vous ne détruirez pas,
Et qu’une espèce d’évidence écumante
Soutiendra et gonflera, qui viendra vous braire au nez,
Et au nez gelé de tous vos Parthénons, vos arts arabes, et de vos Mings
Avec de la fumée, avec de la dilution de brouillard
Et du son de peau de tambour,
Je vous assoierai des forteresse écrasantes et superbes,
Des forteresses faites exclusivement de remous et de secousses,
Contre lesquelles votre ordre multimillénaire et votre géométrie
Tomberont en fadaises et galimatias et poussière de sable sans raison
[...]
Henri Michaux, La nuit remue, Œuvres complètes, I, Bibliothèque de la
Pléiade, Gallimard, p. 457.
•
JE
SUIS GONG
Dans le chant de ma colère il y a un œuf,
Et dans cet œuf il y a ma mère, mon père et mes enfants,
Et dans ce tout il y a joie et tristesse mêlées, et vie.
Grosses tempêtes qui m’avez secouru,
Beau soleil qui m’as contrecarré,
Il y a haine en moi, forte et de date ancienne,
Et pour la beauté on verra plus tard.
Je ne suis, en effet, devenu dur que par lamelles ;
S’il l’on savait comme je suis restée moelleux au fond.
Je suis gong, et ouate et chant neigeux,
Je le dis et j’en suis sûr
Henri Michaux, Mes Propriétés, Œuvres complètes,
I, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, p. 505
•
2
Renversé, lézardé, morcelé, toute appartenance humaine oubliée, c’est seulement
comme un sol que celui-ci maintenant se perçoit, sol indéfiniment déchiqueté,
aux croulantes mottes anonymes, dressées-déjetées, qui n’est même plus un terrain,
mais les vagues d’une mer démontée, d’une mer de terre en désordre, qui jamais
plus ne se reposera.
Sous cette forme informe, qui le prive de lui, il survit, empêché de se
reprendre. Incessant écroulement.
Fragments indéfiniment ; fragments, failles, fissures. Épave oblique.
Henri Michaux, Les Ravagés, Fata
Morgana, 1976, p. 13.
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