Les éditions Obsidiane publient Ressac de l’écrivain et peintre Gérard Titus-Carmel.
9. Neuvième état
(Ostinato) Où se rue la mer basculant à nos yeux
seule crantée sans défaut devant l’invisible et
avançant vers nous pour mourir dans le ressac
de ses vagues par acanthes obstinées & rondes
toutes sœurs quand à rouler pareillement
à leur tête cette ouate la lumineuse écume
sous le ciel toujours changeant toujours le même
et nous demeurant là interdits cois à son bord
le jour délivrant en bélier ses coups au hasard de nos corps
(Acanthe et rinceaux, flore remontée pleine avec les algues visqueuses depuis les profondeurs jusqu’à la lumière du jour et marquant de laisses noires sur le sable brillant la limite où nous pouvons encore nous tenir et parler debout, face au vent. Car on porte le masque de la mort collé sur le visage jusqu’au pire, le blanc des yeux rongé par le sel du lointain qui brûle lentement. On attendait, sans trop y croire, que les os s’allègent et que tout entiers devenus purs embruns, nous connaissions enfin l’extase océanique – mais, au contraire, c’est tout le natal qui remonte en nous et nous alourdit. On sent alors son cœur mourir en soi et devant l’immensité sans remords de la mer inlassable, on se découvre comme adossé à son propre exil ; l’ombre fustigée à ses côtés, on semble fixé dans un hors-lieu du monde tandis que devant nous, indifférentes et continuant à brasser mornement l’infini, ronflent les vagues).
Gérard Titus-Carmel, Ressac, éditions Obsidiane, 2011, pp. 36 et 37.
(présentation de ce livre)
NDLR : les textes de l’ensemble « Ressac » vont par deux, en une séquence de trente « états », page de gauche un poème, en romain, page de droite, un texte de prose, en italique.
Gérard Titus-Carmel dans Poezibao :
Bio-bibliographie, extrait 1, extrait 2, Gustave Roud, une solitude dans les saisons (note de lecture), extrait 3, ext. 4, trois livres (par A. Emaz)