pars, érafle de tes jours le dedans, tes jours à mesure sous tes gestes déboîtés ; ton visage de plusieurs feuillets : tu n’en connais plus aucun, tu empaquettes l’ordinaire ; dans un no man’s land faire mine d’être là, sur un filet de souffle déjà rétracté ; agrégé dans sa propre farine – ne la tourne plus dans celle du monde, quelque chose te réfrène vers l’intérieur, toi si singulier soudain – l’intérieur, s’il en est encore un ; plie bagage ; s’infliger telles désertions, dites, qui le voudrait ?
à travers la nuit l’esprit ficelle dans les vallées l’aboiement des chiens errants, déballe des rouleaux d’ombre sur la caillasse ; comme si on avait changé d’espèce : une chair recroquevillée, à la merci du vaste, où s’engouffrent froid bouillon d’urine, vent himalayen et suif ; et ce vert, l’étincelant mercure des saules
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passé un haut seuil, se faufiler – dans l’aigu d’un instant, jour tendu sur l’enceinte des basaltes, un glacier chavire dans la roche carbonifère, une saison durant on s’arrêterait, adossé aux fenêtres minuscules, où bat un pouls de suie dans les murs ; à filer dans le vent rêche un début de patience, une saveur d’orge grillé sur la langue ; un rai de lumière écarquille le noyau du monde, regarde les bols s’égoutter sur une planche, voici qu’il n’y aurait plus qu’à enfourner la quiétude en soi, y dérouler traces humaines et bannières ; l’asthénie du souffle tantôt secondée par des montants de bois.
Mary-Laure Zoss, Une syllabe, battant de bois, Cheyne Editeur, 2012, pp. 11 et 15.
Mary-Laure Zoss dans Poezibao :
biobibliographie, extrait 1, entre chien et loup jetés (par A. Emaz), extrait 2, Le Noir du ciel (par F. Swiatly), extrait 3, extrait 4, Où va se terrer la lumière (par A. Emaz)
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