« La poésie et la prose d’Yves di Manno :
une disparition bougée »,
à l’occasion de la parution de terre sienne aux éditions Isabelle
Sauvage
(collection présent (im)parfait, 2012, 69 pages, 14 €).
Terre
sienne devait être à l’origine un livre d’artiste composé de
deux volumes, contenant des peintures de Mathias Perez et des poèmes d’Yves di Manno. Seul paraît aujourd’hui le poème.
Mais celui-ci n’a pas trahi son lien de parenté avec la
peinture. Avec le tableau. Car il est tableau lui-même. Il devait être contenu
par le tableau, et se tenir à sa suite ? Il le contient au point qu’il
n’est plus besoin pour le tableau d’apparaître.
La page est toile, comme est toile tout ce qui se tient à
portée de mains, quand il s’agit pour l’être de faire vivre autrement, d’une
manière moins implacable, les désordres qui l’habitent. Chaman improvisé. Et
dans ce désordre de « couleurs / Lavées, délavées » (Champs),
il s’agit pour lui, sans qu’il le sache autrement que par instinct ou intuition, d’inscrire
son identité. Et ainsi de la conserver. Prétendument la conserver. C’est pour
cette raison que le sang se mélange comme naturellement aux couleurs. Et
puisque la page est toile, alors il est logique que dans le poème qui est
matière picturale, dans le poème qui se tient « hors du langage » (terre
sienne est en ce sens « un-livre-hors »), les « vers
[soient] comme du sang » (terre sienne). Yves di Manno écrit dans Discipline : « Le bruit du
verre qu’elle brise, du flacon qu’elle renverse, les couleurs qu’elle mélange à
même le carrelage, étalant la peinture devant la porte, barbouillant à grands
traits sans savoir qui l’épie : par le judas : prend note de ses
gestes, enregistre ses cris, s’exténuant à démêler les formes des animaux
qu’elle dessine à demi nue dans le couloir de la clinique, les deux mains
écorchées, enveloppée d’un drap, rampant sur le dallage maculé de son
sang. ». Et il ajoute dans terre sienne : « [L]e
pinceau fouille / (mais d’une autre // manière) cette plaie d’une / autre
matière ». [...]
Pour faciliter la lecture de cet article et permettre de l'envoyer vers une tablette, une liseuse ou de l'imprimer, Poezibao propose de le télécharger :
et en pdf : Téléchargement : "La poésie et la prose d'Yves di Manno, une disparition bougée", par Matthieu Gosztola
Commentaires