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Les cyprès sont des index dressés,
bien qu’ils ne soient pas pointés vers le haut :
ils ne font que hisser quelque matière extrême
pour la soumettre à l’ouvert.
Les cyprès ne signalent rien.
Ou peut-être rien qu’eux-mêmes
comme des lieux ou des stations privilégiées
où se posent les oiseaux,
ou parfois un mot abandonné,
qui n’est rien d’autre qu’un oiseau de plus.
Mais les cyprès ne sont pas que des index dressés qui ne signalent rien,
mais aussi des offertoires comme des
lances,
des messes qui ne célèbrent ni ne concilient personne,
sauf peut-être leur propre geste,
que ni les hommes ni les dieux ne comprennent.
Des index libérés
de la soumission abusive
de ne signaler rien d’autre qu’une seule chose,
la même chose que le poème,
la même chose que tes yeux, comme devraient l’être tous les index,
les signaux, les signes :
des conclusions étendues,
des prolongations de l’être
qui signalent toutes les choses à la fois.
Los
cipreses son índices erguidos,
pero no apuntan hacia arriba:
sólo levantan cierta materia extrema
para someterla a lo abierto.
Los cipreses no señalan nada.
O tal vez sólo a sí mismos
como lugares o estaciones predilectas
para detenerse los pájaros
o a veces una palabra abandonada,
que no es más que otro pájaro.
Pero los cipreses non son únicamente índices erguidos
que no señalan nada,
sino también ofertorios como lanzas,
misas que tampoco celebran ni propician a nadie,
salvo tal vez su propio gesto,
que ni los hombres ni los dioses comprenden.
Índices liberados
del abusivo sometimiento
de señalar nada más que una cosa,
lo mismo que el poema,
lo mismo que tus ojos,
como debieran ser todos los índices,
las señales, los signos :
celebraciones extendidas,
prolongaciones del ser
que señalan a la vez todas las cosas
Robert Juarroz, dixième poésie verticale, édition bilingüe,
traudcion de François-Michel Durazzo, coll. Ibériques, Éditions Corti, 2012,
pp. 140 à 143.
Roberto Juarroz dans Poezibao :
bio-bibliographie,
extrait
1, notes
poésie 1,notes
poésie 2, ext
2, ext.
3 (Ed. Unes), ext. 4